Dans la bibliothèque des blogueurs… Une fille (du blog des Diablotintines)

livres-bibliotheque-ideale-blogueur.jpg« Une fille » (« désespérée mais remplie d’espoirs » en sous-titre), telle est le nom sous lequel sévit cette blogueuse, travaillant dans la communication après des études de commerce et de sciences politiques, depuis quelques années. Tout a commencé sur le forum des éditions du Diable Vauvert où elle postait des textes libres avant de s’installer, en 2005, à sa fermeture, avec une troupe d’anciens forumeurs sur leur propre blog : Les diablotintines. On y trouve des humeurs, petites nouvelles et pendant un temps des caricatures politiquement incorrects de la dessinatrice Valère. Avec son humour décalé, piquant mais toujours sensible, son écriture au goût de bonbon empoisonné, elle (se) raconte sa passion pour faire des tartes citron en pleine nuit, l’épilation, ses déceptions sentimentales jusqu’à des considérations politiques, économiques, la féminité, la maternité… Cette parisienne, désormais expatriée à Hong Kong, manie légèreté et gravité avec une agilité surprenante. « Je lutte contre la part enfantine de moi-même, je comprends bien que si je veux survivre à tout ce qui m’attend encore, il faut l’abattre. Mais j’ai beau régulièrement [la] mettre à mort, elle ressurgit toujours sans que jamais je n’arrive à l’achever vraiment. » écrit-elle comme en explication. La littérature l’accompagne bien sûr aussi, même si elle porte un regard très critique sur le petit milieu qui l’entoure (blogs y compris !). Découverte de sa bibliothèque très anglo-saxonne où se croisent Zadie Smith et Tom Wolfe et d’autres curiosités…

Quel est le livre qui t’a marqué enfant et/ou ado et qui t’a donné le goût de la lecture ?
Au début, il y a eu les romans champêtres de George Sand La mare au diable et La petite Fadette. Et puis est venu le temps d’Agatha Christie que je collectionnais en livres de poche jaunes. livres-enfance-bibliotheque-ideale.JPG

Le livre qui t’a fait comprendre ce que le mot « littérature » veut dire (claque littéraire)…
Edgar Allan Poe traduit par Charles Baudelaire. Histoires extraordinaires et Nouvelles histoires extraordinaires.

Le livre que tu aimes lire et relire, sans jamais t’en lasser…
J’ai une vieille édition des Fleurs du Mal de Baudelaire. Je lis souvent Spleen. C’est tellement dramatique et tellement beau.

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Le livre que tu aimes honteusement…
Puisque j’ai honte, je n’en dévoilerai pas le titre. En tout cas, c’est une histoire qui commence bien, continue mal et finit bien. Ca se passe en Angleterre, à Londres. Oliver est intelligent, heureux, beau et conduit une grosse voiture de luxe anglaise. Pour parfaire le tout, un soir, il décide d’être altruiste, de faire une BA. Comme il est intelligent, il décide de joindre l’utile à l’agréable et invite Ruth, une femme, pas jolie, pas aussi intelligente que lui mais néanmoins fiancée à un homme séduisant et dessinateur de BD doué, à dîner. C’est pendant ce dîner que tout commence bien, continue mal etc

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L’auteur dont tu liras toujours tous les livres quoiqu’il advienne…
Je ne suis pas forcément fidèle et les auteurs pas forcément constants en qualité. Zadie Smith, Donna Tartt et Jonathan Franzen, je les suis. En même temps, ce ne sont pas des Amélie Nothomb, ils sortent rarement des livres, je ne prends pas de risque quoi.

« Zadie Smith, c’est une langue classique. Mais elle n’en est qu’à ses premiers romans et la modernité, on la trouve dans les personnages, notamment dans Kiki Belsey. Carlene Kipps, c’est l’aristo tout droit sortie du XIXème, elle sait que son mari la trompe, elle sait qu’il ment sur tout, qu’il travestit tout, qu’il est habité par la réussite sociale, c’est un salaud et son fils Michael s’apprête à suivre la lignée de salauds, Victoria, sa fille, belle et fragile, joue à la traînée. Tout ce que voit Carlene, elle se le cache et préfère mourir en silence. Kiki, elle crie. Howard l’a trompée, elle ne le gardera pas pour elle. Howard est à fond pour la discrimination positive. Elle ne l’adule pas pour autant. Elle peut même se permettre d’être circonspecte sur tout ça. Howard. C’était un ami, c’est devenu un amant, puis un mari, puis un père, puis un menteur, un gros connard, un étranger ? Il a vieilli. Il flippe. Est-ce que c’est beau un homme qui flippe ? Est-ce que le temps efface peu à peu le désir ? Où est-ce que ce qui nous a uni voilà trente ans peut être ravivé, est-ce que ça s’est éteint, vraiment ? Comment on fait pour aimer malgré les accrocs de la vie ? Y’a pas de pipi, y’a pas de caca, il n’y a que des gens qui essaient de se débrouiller ou pas avec ce qu’ils ont. » (à propos du roman « De la beauté » de Zadie Smith)

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Le livre que tu n’as jamais pu finir…
J’ai horreur de ne pas finir un livre. Je n’ai pas fini A l’ombre des jeunes filles en fleur de Proust et pire je n’ai jamais réussi à passer la page 1 de Dune de Franck Herbert.

Le livre que tu n’as pas encore lu et que tu veux absolument découvrir…
Quelque chose de Houellebecq. Puisqu’il est dit qu’il est génial et intemporel, je me permets de toujours repousser sans crainte que sa littérature prenne la poussière.

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Le livre que tu recommandes le plus de bouche à oreille…
Ah ah ah je suis toujours très mal à l’aise quand on me demande ce genre de choses. J’ai sans doute une relation intimiste avec les livres que je lis. Mais bon, disons que je recommande souvent de lire Tom Wolfe. « Le bûcher des vanités », « Un homme un vrai », « Moi Charlotte Simmons », une formidable autopsie de la vie américaine, de son organisation, de sa codification.Cet auteur est génial pour comprendre les bonheurs et douleurs de l’American dream. A Hong Kong, j’ai rencontré beaucoup de financiers auxquels je me suis autorisée avec malice à recommander le bûcher des vanités, qui est un roman drôle et cruel sur un trader qui se retrouve au mauvais endroit au mauvais moment (le film qu’en a fait Brian De Palma est honteusement raté), aussi bizarre que cela puisse paraître ils en ont tous entendu parlé ou même lu (disent-ils mais on ne peut pas leur faire confiance ils disent peut-être ça pour ne pas perdre la face en avouant qu’à part les colonnes de chiffres du Financial Times, ils ne lisent pas, les pauvres).

Le livre dont tu aurais aimé être le héros/héroïne
J’aurais voulu être Hercule Poirot. C’est mon détective privé préféré. Il a plein de petites cellules grises, ce qui est fort pratique en toute circonstance. En plus, comme il est belge ; il mange de bonnes gaufres et n’a aucune sexualité.

Le jeune auteur contemporain qui te semble incarner la nouvelle génération littéraire en France (et/ou à l’étranger)…
Je connais mal la nouvelle génération littéraire. J’ai bien aimé Chambre sous oxygène de Jean Baptiste Gendarme.

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Le livre que tu n’aurais jamais cru aimer / livre que tu ne voulais pas lire et pourtant…
Abysses de Schätzing. Je suis venue à bout de ces 1200 pages « bourrées à craquer de savoir scientifique » comme il le dit à la fin en pratiquement 6 mois, une demie année pour lire 1200 pages. C’était bien et c’était ardu. Les abysses, plus de 300 millions de kilomètres carrés, les deux tiers de la planète donc, remplies de noir et de froid, sont inconnues et fascinantes à lire. J’y mettrai pas forcément les pieds en vrai.Le roman questionne beaucoup sur l’Homme qui se croit l’être supérieur du monde, l’organisme le plus évolué, le plus intelligent et le plus sensible d’un univers qu’il ne connaît pas (mais qu’il détruit pour son confort). Et si la mer se mettait à se déchaîner parce qu’elle en a mare mare mare des tonnes de déchets biologiques, chimiques, radioactifs qu’on lui balance quotidiennement ? Crabes fantômes, homards explosifs, algues mauvaises, baleines tueuses, arrêt du Golf Stream, éruptions volcaniques en mer, tsunamis, méthane à hautes doses…ça se déchaîne contre l’Homme qui devient rapidement impuissant. Les Etats-Unis représentés par le général Li (Judith) sont dingues. Les arabes n’y sont pour rien. Nous allons assister à notre propre mort, notre extinction définitive, le temps d’un battement de cil à l’échelle géologique (et même à notre propre échelle).

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Ton livre page-turner : le livre que tu as lu en une nuit, sans pouvoir décrocher…
Donna Tartt, Le Maître des illusions. Je commençais un nouveau job. La première fois de ma vie que je devais prendre le RER pour aller travailler, on m’avait fait parvenir les horaires précis des trains et surligner au fluo celui de 8h22 que je ne devais pas rater pour être à l’heure au petit déjeuner d’accueil (et la ponctualité ce n’était pas de la rigolade dans cette entreprise tayloriste, on m’avait précisé ça aussi). J’ai commencé par louper le RER de 8h22 prise dans le livre que je n’avais pas fini la nuit précédente, j’ai pris le suivant vers 8h33 mais il ne s’est pas arrêté à la station de mon entreprise (ou j’étais à nouveau prise dans le livre…et j’ai loupé l’arrêt qui sait ?). En tout cas, le RER de 8h33 a été sans arrêt jusqu’à la pampa. J’ai pu finir Donna Tartt tranquille en faisant un tour de banlieue parisienne.

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Le livre qui t’a fait pleurer…
Les livres ne me font pas pleurer. Je pleure au cinéma ou en écoutant de la musique ou devant des gens qui me semblent dénuer de toute humanité. Les livres sont beaucoup plus complexes que des images, des sons ou des paroles, il y a toujours une échappatoire, une part de possible.

Le livre qui t’a fait rire/redonné le moral (sorti d’une situation difficile)
Sûrement pas un livre de littérature ! Quand je n’ai pas le moral, je plonge mon nez dans des livres de pâtisserie, c’est coloré, il y a de jolis mots –chantilly, groseilles, griottes, caramel, chocolat, nutella, oranges amères, agar-agar, feuilletée, crème, croustlllant- et de belles images.…Tout paraît simple, beau, réussi. Ca fait du bien. C’est la paix sucrée.

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Que penses-tu du e-book (livre numérique). Pour ou contre ? (et pourquoi).
A priori pour mais la fille qui te dit ça n’a pas d’appareil à e-book…
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Quels sont tes coups de cœur et/ou recommandations des dernières rentrées littéraires 2011-2012 ?
Le petit récit Let go de Chloé Mons et j’ai hâte de commencer Stoner de John Williams traduit par Anna Gavalda mais j’ai un gros pavé de Ken Follett à finir (et aussi un roman de Delphine de Vigan) et puis il y a Purge de Sofi Oksanen à commencer.

6 Commentaires

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  1. Un très chouette article. C’est vraiment passionnant de découvrir l’univers des bloggueuses. Et puis, Le maitre des illusions est l’un des mes romans chouchous 😉

    En tout cas j’adore ce concept. J’ai même envie de répondre à certaines questions afin de poster tout ça sur mon blog.

    Virginie

  2. entièrement d’accord, je pioche désormais régulièrement mes lectures dans ces bibliothèques que j’adore découvrir 🙂

    Ca me donne presque envie de retenter le coup avec Zadie Smith dont je n’avais pas réussi à dépasser le 1e chapitre de Sourires de loup…

    et ne te gêne pas pour reprendre les questions si l’envie t’en dit !

  3. J’aime beaucoup ce concept d’interview!! Très marrant et très bonne idée!!!!

  4. C’est étrange de ne pas pouvoir rire par un livre. Le don de Dieu la part du Diable de John Irving m’avait en temps donné des spasmes de rire. La version cinématographique est très triste par contre. La chick lit m’amuse souvent. Twenties girl si l’on apprécie les histoires de fantômes. Les scénarios de Woody Allen fonctionnent très bien en lecture, Annie Hall, etc. Les pièces de théâtre aussi. Labiche, Guitry, etc.

    Et pleurer? Non. Effectivement, je pleure devant un écran mais pas sur un livre. Les images et la musique associée à celles-ci provoquent facilement les larmes.

    • bobleponge sur 12 juin 2012 à 16 h 28 min
    • Répondre

    ce concept de rubrique est complètement nul. On n’apprend rien de l’auteur, de sa démarche, de ses obsessions. Bref, si j’étais journaliste, j’aurais toujours l’élémentaire bon goût de ne jamais poser cette question mal dégrossie d’entretien d’embauche qui se résume à : mais dites-moi, quelles sont vos références ?
    Une question, passe encore, mais tout un article TOUT un article là-dessus, quelle perte de temps. Les inventaires, c’est toujours lassant.

  5. Félicitations pour cette série d’interviews qui nous montre l’envers de l’écran. Quel plaisir de voir les blogueurs qu’on lit et d’aller espionner un peu leur bibliothèque !
    Amicalement,
    L’Hermite

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