Histoire d’O de Pauline Réage (Dominique Aury), Attache-moi ou L’insoutenable liberté du corps

« Monte, dit-il. Elle monte. » Toute la dialectique d’Histoire d’O de Pauline Réage, classique de la littérature érotique (et intellectuelle), bien avant 50 nuances de Grey d’EL James (et avec le style en plus!), est contenue dans cette simple première injonction. Un ordre, sans explication, une soumission, sans interrogation, ni inquiétude. O embarque avec son amant. Elle le suit confiante, s’en remet entièrement à lui, quelque soit la destination, quelque soit l’issue… Histoire d’O, c’est cela au fond, l’histoire d’une femme qui accepte de se donner, de se livrer entièrement au nom de et pour l’amour. C’est même pour elle la définition même de l’amour : ce don intégral, cet abandon total, absolu tant physique que psychique, à l’être aimé, ce « maître », ce « Dieu ».

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Il n’y a qu’un ou deux mots là-dedans qui m’embarrassent : le mot d’amour et aussi le mot de liberté. Il va de soi que c’est tout le contraire. L’amour c’est quand on dépend (…) » (préface de Jean Paulhan, « Le bonheur dans l’esclavage »)

C’est ainsi qu’elle éprouve la satisfaction de se sentir désirée et possédée. Pauline Réage (pseudo de Dominique Aury née Anne Desclos) invente et propose ici une vision inédite des rapports amoureux, à total contre-courant des discours en vigueur (en particulier féministes) et de nos idéaux culturels romantiques. Une entreprise audacieuse et risquée dans un contexte d’après-guerre où dominent encore une morale puritaine et une vision traditionaliste de la femme.

Histoire d’O aurait été écrit comme une lettre d’amour par l’auteur pour son amant Jean Paulhan (directeur de la NRF), qui la délaissait. L’ouvrage d’abord passé inaperçu en 1954 (paru en même temps que « Bonjour tristesse » de Françoise Sagan qui l’éclipse, mais aussi du Thérèse et Isabelle autre roman érotique de Violette Leduc, à laquelle l’auteur voue d’ailleurs une grande admiration) a ensuite émergé à la faveur du prix des Deux magots en 1955. Il sera vendu à plus d’un million d’exemplaires dans le monde et traduit dans une vingtaine de langues. Succès qui ne manque bien sûr pas de déclencher la polémique (accusé d’être le roman de la soumission féminine ou encore surnommé « la gestapo dans le boudoir » et de livre «intolérable» selon Mauriac…).

René se jeta sur elle comme un forban sur une captive, et elle devint captive avec délices (…) Elle n’était plus libre ? Ah ! Dieu merci elle n’était plus libre.

On pourrait résumer très facilement la célèbre Histoire d’O. Quelques lignes suffisent.Une jeune parisienne, dont on ne sait rien et dont on apprendra bien peu au fil des pages, est conduite, par son amant (René), un beau jour par surprise dans un mystérieux château à Roissy (lieu choisi par hasard par l’auteur). Elle y subira tous les sévices et outrages avant de devenir officiellement « l’esclave » de son amant qui la « donnera » ensuite à son meilleur ami, l’inquiétant et fascinant Sir Stephen, qui finira également par l’abandonner. Voici pour le fond, mais c’est bien sûr la forme qui est primordiale dans ce court récit composé de 4 parties et d’une fin alternative. Cette forme et ce style lui donnent toute son intensité et recèlent de plusieurs niveaux de lecture passionnants.

Histoire d'O et le film Attache-moi

En 1990, Almodovar sortait son film « Attache-moi », comédie « érotico-noire » avec Victoria Abril, exploitant également le fantasme de la femme attachée ou enchaînée et l’inattendu « plaisir » que la victime finira par trouver dans cette docilité et perte de contrôle aux mains de son séquestreur (Antonio Banderas dans le rôle d’un paumé précédemment interné en hôpital psychiatrique). La critique a comparé le film à une variation sur le thème du syndrôme de Stokhlom.

Histoire d’O : une construction narrative mystérieuse, onirique et théâtrale

Pauline Réage ne s’embarrasse pas de préambule ou d’introduction à ses personnages et à l’intrigue, elle entre immédiatement dans le vif (dans tous les sens du terme !) du sujet. O, dont on ne connaît même pas le prénom, est conduite au château par son amant. Ce début direct ne manque pas d’interpeller le lecteur en entretenant le mystère.

Il faudra attendre la 2e partie pour avoir quelques indices sur la vie et l’identité de l’héroïne.
Cette construction et en particulier la 1e partie rappelle celle d’un rêve, d’un fantasme éveillé (ce qui était d’ailleurs l’intention de l’auteur). Paulhan le compare lui à un conte de fée en postulant que les contes de fée sont les romans érotiques des enfants. Au lieu de s’épuiser après la 1e partie particulièrement forte et marquante, l’auteur parvient à poursuivre son intrigue avec cohérence en orchestrant un crescendo dans « l’apprentissage » d’O allant jusqu’à sa déchéance (ou « son élévation » selon le point de vue que l’on adopte…).

C’est ensuite l’art de la mise en scène de Réage qui captive. Avec un goût du détail et une richesse sensorielle, elle nous plonge dans l’ambiance de ce château d’un genre particulier, ses rites, ses règles (l’interdiction de croiser les jambes ou de fermer tout à fait les lèvres en signe d’offrande perpétuelle, ne pas regarder les hommes du château au visage…), ses costumes (les femmes sont notamment vêtues comme des servantes du XVIIIe siècle avec de longues jupes bouffantes et des corselets serrés) et les matières (la soie craquante, le linon, les bas de nylon noir, la jupe en faille noire, la robe de satin vert d’eau, les mules vernies à hauts talons qui claquent sur le carrelage,…) ou encore son mobilier de boudoir très étudié (la grande cheminée, les poufs en fourrure, les fauteuils club en cuir, la porte en fer forgé, le dallage noir…).

Elle s’attarde également à la description des rituels de préparation d’O qui renforcent l’action qui va suivre : le bain, le maquillage érotique (la pointe et l’aréole des seins sont rosies, « le bord des lèvres du ventre rougi », le parfum longuement passé sur la « fourrure des aisselles et du pubis »…)… Bref, c’est un récit très théâtral.

Elle accorde aussi une grande importance à la description technique et précise des instruments de sévice (« un fouet de cordes assez fines, qui se terminaient par plusieurs nœuds et étaient toutes raides comme si on les avait trempées dans l’eau », « un fouet de cuir fait de 6 lanières terminées par un nœud »…) ainsi qu’aux postures d’attachement aux poteaux, aux crochets des murs à l’aide d’anneaux, de chaînettes, les cliquetis…
Ils deviennent presque des parures ce qui fait dire à O par exemple que son amie « serait plus belle avec un collier et des bracelets de cuir. » ou encore « que les coups et les fers allaient bien à Yvonne. »

Ce sont enfin les marques de violence qui s’impriment sur les corps qu’elle restitue avec acuité : les sensations des cordes sur la peau tendre à l’intérieur des cuisses, les balafres, boursouflures de la peau, les « marques fraîches » de cravache sur les reins, « de belles zébrures longues et profondes »… Ces marques sont autant de preuves d’amour tangibles à ses yeux.

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Une richesse stylistique fascinante

Ce qui fait aussi toute la qualité de cet ouvrage c’est sa langue « si pure dans l’impureté». On est loin du roman de seconde zone cliché auquel est souvent associé le genre. Il s’agit ici de grande littérature qu’on ne s’y trompe pas. Réage cultive une langue délicate, précieuse, d’une grande féminité et sensualité, à 1000 lieues du style trash d’une Virginie Despentes par exemple. A aucun moment elle n’utilise de termes crus ou explicites mais toujours des métaphores évocatrices et inattendues : « la bouche à demi-bâillonnée par la chair durcie », « le bâillon de chair qui l’étouffait », « son ventre entrebâillé », « la crête de chair cachée dans le sillon de son ventre », « l’arête de chair où se rejoignent les fragiles lèvres de son ventre. », « quand il s’abîmait en elle… », « les lobes ourlés de cheveux pâles »…

Une belle imagination pour dire sans dire (même si cela peut aussi agacer ou frustrer certains lecteurs qui aimeraient plus de « direct »). Une écriture tactile qui rappelle celle de Colette parfois. Elle nous fait ressentir toutes les sensations charnelles : « la banquette en moleskine glissante et froide qu’elle sent se coller sous ses cuisses », « sur un tabouret elle sent le cuir froid sous sa peau et le rebord gainé de métal au creux même de ses cuisses »…

C’est encore la description très sensible de la beauté féminine (O est bisexuelle) à travers notamment le portrait de Jacqueline, une mannequin dans le studio photo où elle travaille : « Tout en elle sentait la neige : le reflet bleuté de sa veste de phoque gris, c’était la neige à l’ombre, le reflet givré de ses cheveux et de ses cils : la neige au soleil. Elle avait aux lèvres un rouge qui tirait au capucine, et quand elle sourit, et leva les yeux sur O, O se dit que personne ne pourrait résister à l’envie de boire à cette eau verte et mouvante sous les cils de givre… »

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Cette langue élégante s’inscrit dans un cadre bourgeois : O est une jeune femme coquette (« gantée », le rouge à lèvres, la boîte à poudre dans son sac, la coiffeuse dans sa chambre…) évoluant dans un milieu aisé. Les décors des appartements sont ainsi toujours raffinés et luxueux (« des meubles de noyer clair de style Directoire, de grands rideaux de taffetas bleu, les fauteuils Régence, le grand secrétaire fleuri de marqueterie, le petit fauteuil crapaud »…). Son amant est retenu par « un conseil d’administration », ils vont souvent déjeuner au restaurant à Saint Cloud, louent une villa de vacances dans le Midi…

Au-delà de sa dimension scandaleuse ou sulfureuse (bien que Dominique Aury estimait à la fin de sa vie qu’Histoire d’O était presque devenu « un livre convenable » !) ou des rapports sadomasochistes, Histoire d’O est avant tout une réflexion sur l’amour et la passion, sous un angle presque philosophique. Finalement en s’offrant, en s’abandonnant totalement à l’Autre, elle démontre comment elle se délivre d’elle-même ( « Les chaînes et le silence, qui auraient dû la ligoter au fond d’elle-même, l’étouffer, l’étrangler, tout au contraire la délivraient d’elle-même. » ), comment elle trouve son salut d’une certaine manière : « Sa liberté était pire que n’importe quelle chaîne. »
Ce qui ne manque pas de rappeler l’extrait de Kierkegaard dans son « Traité du désespoir » sur cette forme de désespoir féminin « faiblesse » où l’on refuse d’être soi.

Etre enchaînée, fouettée puis marquée aux fers ne sont finalement que des métaphores, des actes symboliques pour exprimer ce désir d’appartenance (appartenir à l’être aimé), synonyme d’amour, tapi, consciemment ou non, en chaque femme (?).

Il est intéressant de suivre le cheminement psychologique ambivalent d’O pour le réaliser. D’abord interloquée, troublée, elle tente de comprendre « l’enchevêtrement contradictoire et constant de ses sentiments » et son goût inattendu pour le supplice, « la douceur de l’avilissement »…
Ce n’est pas la douleur qu’aime O mais c’est ce qu’elle représente et plus particulièrement ce que les gestes de son Amant représentent. « Elle ne souhaita pas mourir mais si le supplice était le prix à payer pour que son amant continuât à l’aimer. »

Tout est donc avant tout le fruit d’une interprétation intellectuelle : « O sentait que sa bouche était belle, puisque son amant daignait s’y enfoncer… » ou encore « Oserait-elle jamais lui dire qu’aucun plaisir, aucune joie, aucune imagination n’approchait le bonheur qu’elle ressentait à la liberté avec laquelle il usait d’elle, à l’idée qu’il savait qu’il n’avait avec elle aucun ménagement à garder, aucune limite à la façon, dont sur son corps, il pouvait chercher son plaisir. »

A cela s’ajoute enfin une dimension mystique puisque l’amant plus qu’un maître est considéré comme un dieu : « Il la posséderait ainsi comme un Dieu possède ses créatures, dont il s’empare sous le masque d’un monstre ou d’un oiseau, de l’esprit invisible ou de l’extase. » ou encore « Elle se trouvait heureuse de compter assez pour lui pour qu’il prît plaisir à l’outrager, comme les croyants remercient Dieu de les abaisser. » [Alexandra Galakof]

Voir le dossier : Le potentiel érotique de la littérature

Paroles de l’auteur, Pauline Réage/Dominique Aury

A propos de Sade : « Il m’a fait comprendre que nous sommes tous des geoliers, et tous en prison, en ce sens qu’il y a toujours en nous quelqu’un que nous-même nous enchaînons, que nous enfermons, que nous faisons taire. Par un curieux choc en retour, il arrive même que la prison ouvre à la liberté« .

Sur le reproche d’avoir écrit un roman anti-féministe, elle répond (dans ses entretiens avec Régine Desforges) que : « La sexualité d’O est autonome, les supplices qui lui sont infligés sont plus qu’un choix : une demande. Sir Stephen et René sont les instruments de sa jouissance, et ne la dominent en rien. Finalement ne serait-ce pas O qui les contraint ? ».

A propos de l’identité

« Rien n’est plus fallacieux et mouvant qu’une identité.. Si l’on peut croire, comme le croient des centaines de millions d’hommes, que nous vivons plusieurs vies, pourquoi ne pas croire aussi que dans chacune de nos vies nous sommes le lieu de rencontre de plusieurs âmes ? Qui suis-je enfin dit Pauline Réage sinon la part nocturne et secrète, qui ne s’est jamais publiquement trahie par un acte, par un geste, ni même par un mot, mais communique par les souterrains de l’imaginaire avec des rêves aussi vieux que le monde ? »

L’interprétation psychanalytique d’Histoire d’O :

« Se faire fouetter est pour O « un pas en avant vers la destruction, vers le désir d’anéantissement (…). On m’a envoyé un jour une étude psychanalytique sur le personnage d’O, d’où il ressortait ce que je savais très bien, que c’était un personnage qui courait à sa perte. Les personnages de Racine courent à leur perte. O cherche à être délivrée d’elle-même. » On ne peut trouver l’absolu que dans la mort, et parfois dans le supplice on peut trouver la paix. » (explication de l’auteur Pauline Réage, dans ses entretiens avec Régine Desforges)

Visuel d’illustration ci-dessus, droite : Pauline Réage alias Dominique Aury, dans les années 1940, photo Lipnitzki

13 Commentaires

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    • michel taupin sur 15 juillet 2008 à 12 h 25 min
    • Répondre

    Merci beaucoup pour cet article !

  1. J’aime beaucoup ce livre, mais je trouve détestable l’usage qu’en font bon nombres de ges du sm qui prennent ce livre pour un bréviaire de la relation maitre/soumise, comme ils le font souvent également avec Le lien de Vanessa Duriès. Le nombre de types qui se choisissent Sir Stephen comme pseudo, c’est effarant! C’est assez troublant de voir que beaucoup sont incapbles de voir une fiction et seulement une fiction dans ce texte (je te rejoins sur l’idée de fantasme éveillé).

    Anecdote, Nine Inch Nails a écrit en 1994 une chanson qui s’intitule Happiness in Slavery… Traduisez et vous allez sourire.

  2. De rien Michel 😉
    comme tu le dis, Dahlia il faut dépasser les préjugés ou raccourcis SM sur ce livre qui va en fait beaucoup plus loin que cela.
    Amusante en tout cas cette anecdote des pseudos "Sir Stephen" !

    Je recommande aussi les entretiens de Régine Desforges avec Pauline Réage qui sont très précieux pour aller plus loin sur ce roman, intitulé "O m’a dit" (si vous arrivez à vous le procurer) :
    http://www.amazon.fr/dp/22530153...

    Dahlia, toi qui semble experte (ou autre lecteur/lectrice qui passerez par là), as-tu vu le film de Just Jaeckin ? J’ai essayé de trouver des extraits -significatifs" sur youtube sans succès…

    • Message de Julie Turconi sur 16 juillet 2008 à 12 h 14 min
    • Répondre

    Pour m’être moi aussi prêté au jeu de l’écriture de nouvelles érotiques (dont une après avoir lu "Histoire d’O", classique incontournable), je trouve votre dossier intéressant ! À lire donc, si vous ne connaissez pas : "À deux", de Julie Turconi et FX Liagre aux éditions Quebecor (pour + d’infos, vous pouvez consulter la page Amazon : http://www.amazon.ca/%C3%80-deux...
    😛

    Julie Turconi

    • Folantin sur 16 juillet 2008 à 13 h 05 min
    • Répondre

    [Message dupliqué]
    Le bouquin de Pauline Réage, il me semble que celui ci se confond jusqu’à la caricature au récit érotique SM-fétichiste tel qu’il prolifère un peut partout mais en particulier sur internet (je pense inutile d’indiquer ici les adresses des sites spécialisés). On pourra objecter qu’avec histoire d’O c’est différent car il s’agit avant tout d’une quête mystique, que la femme se libère en étant dominée et blablabla… ce ne sont rien d’autre que les lieux communs de la culture BDSM fétish. Ceci dit sans porter de jugement.

    Donc je reviens à l’idée évoquée plus haut qu’il s’agit aujourd’hui d’un recit de GENRE assez inofensif ("Dominique Aury estimait à la fin de sa vie qu’Histoire d’O était presque devenu « un livre convenable » nous rapporte d’ailleurs l’article). Comme tel, publié aujourd’hui ce roman serait noyé dans le flot de la production contemporaine.

    Dans les années 50 en revanche, posé sur les rayonnages à coté d’un bouquin de Simone de Beauvoir, on imagine bien tout ce qu’il pouvait avoir de provoquant.

    Pour autant je ne crois pas que certains couples aient attendu pauline reage pour se divertir avec des cravaches.

    Plus probablement, j’imagine qu’il aura fallu attendre le truchement de ce bouquin pour que ces pratiques ancestrales accèdent à un début de banalisation médiatique ; prétexte à la naissance du genre littéraire comme à l’extension du domaine de la routine sexuelle.

  3. Folantin, ton commentaire sur Histoire d’O a été dupliqué ici car il pourrait intéresser d’autres lecteurs.

    Quelques petites réactions à ton jugement : "les lieux communs de la culture BDSM fétish" > honnêtement je ne connais pas trop donc je ne sais pas si c’est ce qui est mis en avant en général, j’avais plutôt entendu des trucs du genre "le plaisir ds la douleur" ce qui n’est pas vraiment le cas ici.

    "la femme se libère en étant dominée" > c’est pas tout à fait ça, c’est plutôt le sentiment d’appartenance et de se sentir désirée (enfin Marianne me corrigera peut-être si je me trompe !). Ne pas oublier que Pauline Réage se sentait délaissée au moment de l’écriture de ce roman.

    "Comme tel, publié aujourd’hui ce roman serait noyé dans le flot de la production contemporaine."
    > mmh, alors là je serai bien en mal de prédire son succès rétrospectivement mais ce que je peux en dire c’est que je ne l’ai absolument pas lu comme un bouquin "banal" ou même "convenable", c’est un livre fort par ses idées et son style, qui marque, quelque soit l’époque. Enfin on ne le lit peut-être pas de la même façon selon que l’on soit homme ou femme, je suppose.

    Encore une fois le succès d’un livre érotique est-il lié uniquement à sa dimension transgressive ? Non arrêtons de croire qu’il suffise de parler de sexe et de cravaches (ou de fétichisme,etc) pour faire un livre remarquable ou au minimum un succès (il y a bon nombre d’ouvrages de seconde zone sur ce thème…).

  4. Ah le film de Just Jaekin! Une bonne tranche de rigolade involontaire! Voici ce que j’en avais dans un vieux post:

    "J’avais déjà évoqué le fait que l’adaptation d’Emmanuelle par J.Jaeckin atteignait des sommets de nunucherie sexuelle seventies. Ne croyez pas qu’en s’attaquant au sm selon Pauline Réage il fasse mieux! C’est meme le contraire, le texte élégant et délicatement pervers devient ici totalement risible. Quant à Corinne Cléry qui tient le role d’O, on ne peut pas dire qu’elle joue avec une grande conviction… Durant les scènes de flagellation, elle ne se cabre pas quand il faut, met le moins de passion et sentiment possible dans sa voix, une catastrophe, on n’y croit pas une seconde. Ajoutez à ça une esthétique typiquement seventies, faite de peaux de betes, de feux de cheminées et autres décors ringards dénués du doux mystère et de la subtilité sensuelle qu’on pourrait espérer. Quant aux personnages masculins, on a vraiment du mal à penser que des femmes puissent se soumettre à eux aussi facilement; ils sont tellement exempts de séduction et d’autorité bienveillante (à part peut-etre pour Sir Stephen et encore) que c’est presque une insulte à l’idée qu’on se fait du texte. Enfin qu’on se rassure, puisque avant Jaeckin, Guido Crepax a aussi fait une adaptation visuelle d’Histoire d’O avec ce trait tout à la fois élégant et porno si caractéristique."

    Donc Alexandra, tu peux voir le film si tu as envie de constater à quel point le texte a été trahi… Mais je te conseille plutôt la BD de Crepax.

  5. C’est marrant que tu évoques cette représentation visuelle que tu te faisais des différents personnages, je serai bien en peine de leur donner un visage… Le fait même que l’héroïne ne porte qu’une lettre en guise de prénom est assez symbolique.

    • laurence.biava sur 17 juillet 2008 à 20 h 32 min
    • Répondre

    Emmanuelle, Histoire d’O, on est vraiment pas faites pareilles ! moi, j’avais adoré les deux. D’une grande sensualité, les héroines sont pas aussi nunuches que tu le dis. Mais mon impression est peut-être faussée, à raison, par le fait que j’ai lu le livre de Pauline Réage APRES avoir vu le film. Par contre, je te rejoins sur l’esthétique années 70, forcément, vus d’un autre oeil aujourd’hui, on se rend compte qu’ils ont très mal vieillis. Et ça n’a rien à voir avec l’explosion de la pornographie typique de l’époque. A plus tard.

    • nikita sur 15 octobre 2008 à 15 h 56 min
    • Répondre

    Nous vivons une relation "sm" d’appartenance. Qq chose de très dur à comprendre pour le commun des mortels, et dur à assumer pour nous.
    Histoire d’O aide a une certaine compréhension de cela. Mai il reste un mystère; aucun roman, récit, ou encore moins film traitant du même sujet en inversant les sexes (sans tomber dan le porno évidemment !)
    Pourquoi ?

  6. "Mai il reste un mystère; aucun roman, récit, ou encore moins film traitant du même sujet en inversant les sexes (sans tomber dan le porno évidemment !) "

    Et les livres de Leopold Sacher-Masoch? On m’aurait menti? 😀

    • Moses sur 10 juin 2010 à 9 h 36 min
    • Répondre

    Histoire d’O, quel pensum ! Ce sadomasochisme intellectualisé, franchement, aucun intérêt pour moi. Des auteurs comme Françoise Rey ou Alina Reyes écrivent quand même des choses plus intéressantes, plus évocatrices sans être rentre-dedans ni vulgaires. Ces romans plaisent d’ailleurs plus aux femmes que ne peuvent le faire ceux qui ont visiblement été écrits pour complaire à l’imaginaire masculin – ou ce qu’on croit en savoir…

    • Giacomo sur 2 juillet 2020 à 18 h 37 min
    • Répondre

    Depuis 10 ans il n’y a plus aucun commentaire sur l’histoire d’ O ? Et la plupart sont faits par des femmes à en juger par les pseudonymes. J’ai découvert ce texte magnifique quand j’étais encore un jeune homme et il m’a bouleversé tout de suite. J’en suis tombé amoureux et mon amour pour O n’a pas cessé depuis. Ça fait maintenant presque 40 ans que je la reprend avec plaisir et je dois avouer que certains passages je les connais par cœur et me font toujours ban der comme la première fois…

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