Politique et littérature font-elles vraiment bon ménage ? De Zola à Régis Jauffret…

Je souhaite réagir à un phénomène qui me gêne : celui de rapprocher voire d’associer littérature et politique. Le débat est séculaire mais c’est l’initiative du Matricule des anges consistant à « donner aux écrivains la possibilité de s’exprimer sur la campagne électorale 2007 » sur un blog spécial « Ecrivains en campagne » qui en est le catalyseur…

Il flairait une sottise si invétérée, une telle exécration pour ses idées à lui, un tel mépris pour la littérature, pour l’art, pour tout ce qu’il adorait, implantés, ancrés dans ces étroits cerveaux de négociants, exclusivement préoccupés de filouteries et d’argent et seulement accessibles à cette basse distraction des esprits médiocres, la politique, qu’il rentrait en rage chez lui et se verrouillait avec ses livres. (extrait d’A rebours de JK Huysmans) »

La politique est l’ennemi de l’imagination. » (Ian McEwan, The Independant, 07/07/92)

Cela fait déjà quelque temps que je réfléchis à cette question qui surgit régulièrement dans la critique et il me semble que littérature et politique n’ont rien à faire ensemble et que leur « union » est même dangereuse pour la création littéraire. Récemment un lecteur (Folantin) réagissait sur la chronique de Microfictions de Régis Jauffret en qualifiant ce dernier de « bon bourgeois de gauche »*.
Son analyse m’a surprise car quand je lis un roman, je me demande rarement (jamais en fait !) de quel bord politique appartient l’auteur (et si la question affleure c’est en général mauvais signe, signe que l’auteur a usé de ses gros sabots pour diffuser son idéologie politique personnelle…).
Je me laisse avant tout porter par ses mots, son style, sa poésie, son imaginaire.
J’évite d’ailleurs consciencieusement les « romans » trop implantés dans un contexte politique (de type « politique fiction », ex : le récent « Supplément au roman national » de Jean-Eric Boulin) ou même social (de type « la banlieue », thème en vogue) voire socialo-moralisateur.

Quand de simple toile de fond ou décor en arrière-plan, il devient raison à part entière d’être du roman (partisan, « à thèse », « propagandiste ») pour mieux masquer, souvent, leur vacuité stylistique littéraire ou romanesque au profit d’une détestable littérature messagère. Je pense notamment au roman de Russel Banks, « American darling » qui illustre bien cet écueil, bien qu’il ait été largement salué par la critique mais vraiment quel pensum ! Dans une moindre mesure, je ferai le même reproche à Philip Roth qui n’hésite pas à user de ses gros sabots politico-moralistes ajoutant de belles lourdeurs dans ses romans, comme en témoigne la Pastorale américaine qui ne fait pas toujours dans la subtilité… Quant à Wolfe (Tom) ce n’est guère mieux… On est plus dans le docufiction que dans une oeuvre littéraire digne de ce nom.

Historique: De la séparation de la littérature comme champ autonome

En fait la séparation de la littérature de la politique ou de tout autre domaine à visée religieuse, morale ou éducative, date de la création d’un champ littéraire autonome à la fin du XVIIIe et au cours du XIXe siècle. C’est ainsi que Virgil pourtant considéré jusqu’alors comme un modèle d’expression en Angleterre commençait à être jugé comme « trop politique » pour les jeunes sensibilités. Le maître d’école essayiste et prêtre Vicesimus Knox établissait aussi que la littérature était un discours plus pur que le reste et qu’elle souffrait considérablement d’être contaminée par d’autres intérêts, comme le rapporte Trevor Ross dans son ouvrage sur la constitution du canon littéraire anglais (The making of the English Literary Canon, p.298).
Ce critique anglais (auteur de plusieurs anthologies de référence à l’époque) par ailleurs prêtre anglican et directeur d’école, remarquait notamment, dans un essai sur la lecture, que la poésie et les belles lettres ne pouvaient atteindre ou toucher celui dont la tête résonnait de la cacophonie des querelles politiques des tavernes. Il déplorait à ce titre que les oeuvres d’élégnce stylistique soient vouées à tomber dans l’oubli tandis que les pamphlets politiques étaient célébrés selon lui.

Le plaisir esthétique du texte littéraire devient alors prioritaire.
En France l’Abbé du Bos dans son influent traité Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture (1719) faisait aussi la différence entre ce qui était lu pour le plaisir esthétique de ce qui était lu pour « apprendre », sonnant le glas du « doctus poeta » (le poète savant): “Les gens de métier sont les seuls qui se fassent une étude de la lecture des Poètes. On ne les lit plus, nous l’avons déjà dit, que pour s’occuper plus agréablement, dés qu’on est sorti du Collège, et non pas comme on lit les Historiens & les Philosophes, c’est à dire, pour apprendre.” Voltaire, dans son Dictionnaire philosophique (1764), remarque que le terme « littérature » s’applique encore aux « ouvrages savants » comme aux « ouvrages de goût », mais il réfute le premier emploi comme un archaïsme et défend la restriction aux seconds. L’imagination prenant alors progressivement le pas sur la reconstitution historique comme muse des poètes au cours du XVIIIe siècle. Il n’empêche que le critère idéologique et politique restera déterminant pour la “canonisation” des classiques.

Déjà dans les années 20, Virginia Woolf le déplorait parfaitement (lors d’un cycle de conférences « Aspect du roman ») : « Je crois que tous les romans commencent avec une vieille dame assise en face de vous ; c’est-à-dire que tous les romans ont pour matière le personnage et que c’est afin d’exprimer le personnage, et non de prêcher des doctrines, des slogans, ou pour chanter les louanges de l’Empire britannique, que se sont développés les romans, tantôt gauches, bavards et plats, tantôt riches, dynamiques et vivants. Mais, le tempérament de l’auteur entre en jeu. Vous voyez le personnage d’une façon et moi d’une autre. Vous lui prêtez telle intention, moi telle autre. Et quand vient le temps de la rédaction, chacun effectue une sélection fondée sur des principes personnels. »

La romancière a d’ailleurs toujours dressé une cloison bien nette entre ses écrits de militante et sa fiction.

De même le grand Nabokov dans son essai « Littératures » indique entre autres qu’il « refuse les sujets d’actualité, la satire, fuit la politique… »

Côté français, Flaubert, qui a dit aussi un grand nombre de stupidités, partageait néanmoins aussi cette idée quand il exhortait sa maîtresse et écrivain Louise Colet à s’affranchir du joug de ses doctrines politico-sociales et citait ainsi comme l’une de ses faiblesses « le philosophisme, la maxime, la boutade politique, sociale, démocratique. » (Correspondance, XIII, 327, 13/14-4-53) et prônait de l’autre côté la souveraineté du style et de la forme : « Le style c’est la vie! c’est le sang même de la pensée! »
Son confrère Stendhal, le rejoint et commentait dans Le rouge et le noir :« La politique est une pierre attachée au cou de la littérature, et qui, en moins de six mois, la submerge. La politique au milieu des intérêts d’imagination, c’est un coup de pistolet au milieu d’un concert. »

Et même Zola dont j’ai utilisé l’illustration dans son implication certes très courageuse et admirable mais aussi fatale dans l’Affaire Dreyfus en 1898, considérait malgré tout littérature et politique comme deux domaines distincts. Il prenait garde ainsi de se tenir à l’écart de la « mêlée politique » qu’il considérait comment nocive en particulier pour les auteurs s’ils tenaient à conserver une prose de qualité. C’est ains qu’au sujet de Jules Vallès, ancien communard (à qui il reprochait son attitude d’extrémisme négateur) il condamne férocement cet alliance dangereuse et délètère : « Ah s’il m’écoutait, comme il sentirait sa valeur et comme il laisserait la politique aux écrivains ratés, qui s’y réfugient parce que le public n’a pas voulu lire leurs drames ou leurs romans ! Je l’ai dit ailleurs, la politique, en nos temps troubles est le lot des impuissants et des médiocres » (Correspondance, t.3, p.336).

Dans son recueil de critiques littéraires, « Mes Haines », l’auteur de Germinal (souvent taxée d’oeuvre politique à tort d’ailleurs même si la critique/satire sociale est bien sûr sous-jaçente mais jamais manichéenne, chacun en prenant pour son grade et l’humain au sens large restant au coeur de l’oeuvre avant tout, indépendamment de tout courant politique), rétorquait plus particulièrement à l’anarchiste Proudhon qui clamait que l’art devait avoir « une destination sociale » et une forme « collective » et « communautaire » au détriment de l’individu allant jusqu’à nier les droits d’auteur au passage : « Votre communauté et votre égalité nous écoeurent. (…) Nous ne sommes au service de personne, et nous refusons d’entrer au vôtre. Je n’admets dans l’art que la vie et la personnalité. J’aime la libre manifestation des pensées individuelles. » (p.40).

Cette volonté d’assujetir la création à un engagement social qui se développait dans la 2e moitié du XIXe siècle était d’ailleurs vue comme une menace grave pour la liberté de l’expression par les artistes en particulier partisans de « l’art pour l’art » (romantiques de la 2e génération).

Pour revenir à nos contemporains, même un auteur comme l’anglais Jonathan Coe, réputé pour ses « satires politiques féroces » (Testament à l’anglaise réussit néanmoins à faire de sa critique politique quelque chose qui reste lisible d’un point de vue littéraire notamment grâce à la dimension intimiste qui alterne en parallèle et son caractère burlesque voire grotesque de toute la chose) commentait dans une interview : « Testament à l’anglaise est un livre politique dans le sens où il défend un point de vue politique. Le Cercle fermé a probablement aussi un contenu politique, mais cela se sent moins. Car, aujourd’hui, j’utilise différemment la politique dans mes livres. Ce que j’ambitionne de faire, c’est d’offrir une description aussi fidèle que possible du monde tel qu’il est. On peut d’ailleurs considérer que c’est là encore un projet politique au sens large du terme. Dans Testament à l’anglaise, j’essayais de convertir mes lecteurs à mon point de vue, maintenant je ne crois plus qu’il soit possible ni même souhaitable pour un roman d’y parvenir« .

A mon sens cette volonté politique (politicienne) dénature, pollue l’art, en occultant tout ce qui doit justement le distinguer de ces considérations. Je fais ici encore une mise à jour avec un extrait d’un éditorial publié en 2009 par Vincent Jaury, rédac chef du magazine Transfuge qui s’énervait lui-aussi sur cette tendance malsaine de l’amalgame littérature/politique (http://www.transfuge.fr/editorial,79.html). Il donne pour exemple Sartre
qui avait souhaité « faire oeuvre de littérature, quand les militants communistes, qui avaient fait de lui un fer de lance, l’insultèrent. Sartre venait de commettre le pire des crimes : trahir son engagement politique pour s’occuper d’une affaire bourgeoise, la littérature. » Il le qualifie de « sectarisme insupportable, ennemi de la liberté de pensée, ennemi de la littérature« .

Il cite aussi un autre exemple intéressant celui de Kundera (dont je parle aussi ci-dessous) qui s’est fait tacler dans une critique littéraire des Inrocks « car l’écrivain n'[était] plus politique : il a osé écrire que la recherche du beau était devenue son plaisir. » Il ajoute à juste titre ; « Il avait commis le crime de lèse-majesté comme Sartre des décennies avant. D’être littéraire, simplement littéraire. (…) L’essentiel de l’essai de Kundera était oublié : les analyses littéraires brillantes, et les grandes interrogations existentielles. Quand la politique s’empare de la littérature, on risque de s’aveugler. » Le reste de son article est par contre assez lamentable (cf: défense copinage de Bégaudeau !).

Si j’ai envie de comprendre certains enjeux (géo)politiques ou sociaux, je préfère lire ou écouter un support approprié… Que la politique s’exprime là où elle doit l’être, à travers les débats, les discours, les essais, les articles/tribunes dans les journaux… A mes yeux ce n’est pas le rôle du roman. Ce n’est en tout pas du tout ce que je recherche en littérature (et appparemment pas non plus celui de grands noms de la littérature ci-dessus cités).

Mais j’ai l’impression qu’aujourd’hui lire un livre pour le pur plaisir littéraire fait peur. Il y a une sorte d’obligation de devoir « apprendre » à tout prix quelque chose. Il faut lire « utile ». Comme s’il fallait ennoblir la littérature avec un sujet « plus sérieux ». Cela n’est qu’après tout qu’une répétition de l’histoire littéraire et de débats esthétiques séculaires, depuis au moins la fin du XVIIe avec la doctrine néoclassique, sous la houlette de Boileau, serinant que la littérature devait « plaire et instruire », en s’appuyant sur les principes d’Horace (déformés puisque à la place du « et » il s’agissait originalement d’un « ou », le clivage étant de toute façon très artificiel, car l’instruction peut être un plaisir, et qu’entend on par le terme lui-même ? Cela pourrait faire l’objet d’une autre longue dissertation sur laquelle je ne m’étendrai pas ici… désolée ! :-).
Cette dimension didactique de la littérature qui d’ailleurs jusqu’à la fin du XVIIIe et même XIXe siècle n’avait pas vraiment d’existence distincte autonome (elle était regroupée avec les écrits scientifiques ou religieux entre autres) a commencé à être remise en question à cette époque avec la naissance de la catégorie des « Belles lettres » et une approche esthétique plus « désintéressée » (c’est à dire non basée sur une « utilité » comptable au sens premier du terme, mais plus axée sur la beauté artistique).

Baudelaire lui-même disait (dans « Mon coeur mis à nu » : « Etre un homme utile m’a paru toujours quelque chose de bien hideux. » (il avait d’ailleurs renoncé au titre « Les limbes » pour son recueil des Fleurs du mal en raison de ses connotations socialistes).

Oscar Wilde, chef de file du mouvement de l’Art pour l’art, faisait ainsi dire à l’un des personnages dans « Le portrait de Dorian Gray » : « Oui, j’aimerais écrire un roman aussi ravissant qu’un tapis persan et aussi peu réel. Mais il n’y a de lecteurs en Angleterre que pour les journaux, les manuels et les encyclopédies. De toute la population du globe, les Anglais ont le moins le sens de la beauté littéraire. »

Dans un autre contexte artistique, celui de la peinture, on peut rapprocher cette problématique des turbulences rencontrées par l’Académie Royale des arts à Londre à la fin du XVIIIe siècle, sous patronage du roi Georges III, dont les membres étaient sans cesse accusés de faire des œuvres servant les intérêts monarchiques (ce que raconte très bien Holger Hoock dans « The King’s Artists: The Royal Academy of Arts and the Politics of British Culture 1760-1840 »), même si leurs relations incestueuses avec le pouvoir était encore bien moins fortes que celles d’une France absolutiste (en particulier celle de Louis XIV bien sûr). Jusqu’à la naissance d’un marché de l’édition et de la possibilité de commercialiser leurs oeuvres, les écrivains étaient d’ailleurs tributaires du bon vouloir politique de leurs « patrons », de riches aristocratiques qui jouaient alors le rôle de mécènes et les entretenaient pour qu’ils écrivent poèmes et odes pour chanter leurs louanges (cf. le « country house poem » par exemple en Angleterre au XVIIe siècle notamment).

Mais il semble qu’aujourd’hui parler littérature à seule fin littéraire soit ennuyeux ou sans intérêt. Je regrettais d’ailleurs à ce titre que l’ancienne émission « Culture et dépendance » sur France 3 (désormais arrêtée), contrairement à son titre, n’invitait (réquisitionnait ?) des écrivains que pour les faire réagir aux dérives de la gauche, aux banlieues ou encore à la Constitution européenne ou au « déclin français », tout en se donnant bonne conscience (on donne une visibilité à la littérature mais attention on en parle pas surtout !)… Des sujets sociaux ou politiques donc mais jamais (ou rarement et trop brièvement) de questions sur leur livre, leur univers romanesque, leur écriture ou leur inspiration… Ce qui est un comble quand même pour une émission dite « culturelle ». D’ailleurs, désormais son animateur « FOG » a décidé d’arrêter le déguisement et de faire une vraie émission politique qui s’assume -plus ou moins- en tant que telle (il invite toujours, tout de même, des écrivains « à réagir »). Mise à jour 2018 : même le « magazine littéraire » qui n’a plus de littéraire que le nom tristement dans sa nouvelle version « le nouveau magazine littéraire » a décidé de se centrer sur un contenu plus politique, sans doute plus vendeur…

Oui, les écrivains sont des citoyens, oui ils ont des convictions (ou non) et l’on peut être un « écrivain engagé » mais on n’est pas obligé de mélanger les deux au point de ne plus savoir ce qu’on fait : militant ou écrivain ?
Gabriel Matzneff (que je n’approuve bien sûr absolument pas sur le plan personnel et des ses pratiques pédocriminelles) écrivait ainsi à juste titre dans son journal « Les soleils révolus »: « J’ai des idées (politiques, religieuses, etc) comme tout le monde, et j’espère qu’elles ne sont pas plus bêtes que celles des autres ; mais, intelligentes ou insanes, ce ne sont pas mes idées qui font de moi un écrivain, c’est mon ton singulier, « ma petite musique » aurait dit Céline. Chateaubriand était royaliste et croyant, Stendhal jacobin et athée, mais leurs lecteurs s’en foutent et ils ont bien raison : s’ils les aiment, c’est pour tout autre chose que leurs convictions. C’est pour l’ineffable musicalité de sa langue que nous admirons, adorons Racine ; non pour ses convictions et ses idées. Un écrivain, c’est une écriture : une sensibilité soutenue par un style. »

Mise à jour 2011 et 2016 : fait amusant (et j’avoue qui m’a -agréablement- surprise), François Bégaudeau, pourtant toujours très prolixe sur sa « sensibilité politique de gauche » ou « ses parents encartés au PC« , considère que ce n’est pas le rôle d’un écrivain que de s’exprimer et donner son opinion sur tout tel un polémiste (« les professionels de l’opinion »). Il réagissait ainsi dans l’émission de Ruquier (On est pas couché) en 2016 face à la journaliste Léa Salamé lui reprochant de ne pas s’être indigné des propos d’un homme politique interviewé avant lui. Il ajoutait que ce n’est pas non plus le rôle de l’écrivain de « dénoncer » comme la critique ne cesse de le clamer : « Pour moi les livres ne dénoncent pas, j’ai du mal à accoler la littérature avec l’idée de dénonciation » et réfute son accusation de la « démission des intellectuels de gauches ». « Comme tout le monde j’ai des idées sur tout mais je n’ai pas envie d’ouvrir ma gueule à propos de tout et de n’importe quoi« , comme essaient d’y pousser les médias. Son confrère Xabi Molia, confiait précédemment un agacement dans la même veine, sur le jugement littéraire qui ne se fait plus sur des critères littéraires mais sur son adéquation avec le contexte socio-politique du moment: « on ne sait plus juger un roman pour ses qualités propres, les critiques cherchent un angle, un message, une résonance avec l’actualité. Prenez la polémique sur Les Bienveillantes [Jonathan Littell, Goncourt 2006] : on a glosé sur l’exactitude historique, mais on a oublié que la fiction est aussi un lieu d’élaboration de la vérité, un moyen de connaître le monde. J’écris des histoires pour mieux comprendre moi-même certaines questions, certains sentiments. » (extrait interview Standard Magazine, dec. 2011).

A l’inverse, Annie Ernaux, questionnée (poussée ?) sur le sujet dans un entretien intitulé « Écrire, écrire, pourquoi ? » par Raphaëlle Rerolle estime « que l’ecriture est de toute façon un acte politique. » Toutefois, elle fait référence ici à l’acception large du terme sans appartenance partisane, dans la mesure où « écrire provoque une action. » « On ne peut pas penser écrire et n’avoir aucun retentissement (…). Le livre a une influence sur la conscience et l’inconscient des gens. » Opinion que je partage puisqu’un livre véhicule des idées sur la vie, les relations humaines et la société en général. Toutefois la littérature est dénuée du pragmatisme propagandiste (et fort heureusement) d’un homme ou d’une femme politique. Un écrivain littéraire ne devrait ainsi pas de « programme » (un « agenda » diraient les américians) auquel il chercherait à faire adhérer le lecteur. Ernaux conclut d’ailleurs : « Mais cela dit, jamais je n’ai réfléchi au type d’action que mes textes produisaient. »
On rejoint ici le slogan féministe selon lequel le « personnel est politique » (the personal is political), au sens où les actes privés relèvent de la responsabilité publique quand ils portent atteinte aux libertés ou aux droits humains et citoyens et que ces actes privés nous engagent sur un plan éthique. Il s’agit encore une fois d’une acception large du terme « politique » que je partage car je crois en effet qu’un livre est toujours porteur d’idées, je ne nie absolument pas cette dimension. Et un roman qui en serait dépourvu serait tout simplement creux et vide de sens et d’intérêt. Mais ces idées doivent circuler de façon fluide et subtile, et je dirai sans parti pris trop marqué. Le lecteur doit pouvoir conserver une marge d’interprétation importante, l’auteur ne doit pas la lui pré-macher ou tenter de l’orienter trop autoritairement en martelant une thèse. Je rejoins ainsi ce que disait le critique universitaire William Marx : «La littérature ne saurait se séparer des systèmes idéologiques au sein desquels ou même contre lesquels elle se forme. Elle est engagée malgré elle. Qu’ils le veuillent ou non, les plus farouches partisans de l’art pour l’art expriment encore une vision particulière du monde et de la cité.» (citation tirée de son ouvrage « Politique de la littérature de Jacques Rancière »). La littérature se nourrit de ce qu’est son auteur, de son expérience, de sa sensibilité et de son regard sur les autres, la société, le monde qui l’entoure, influencé par son genre, sa classe sociale, son identité au sens large. On écrit jamais que depuis sa hauteur, même si on tente de se glisser dans la peau d’autrui, cela ne reste toujours qu’une tentative de glissement d’un être dans un autre, donc du regard subjectif d’un être sur un autre. Il n’y a pas de littérature extérieure ou objective donc toujours l’expression d’une personnalité et de ses points de vue, ce qui peut être nommé « politique » au sens général du terme.

Si l’histoire a certes montré des corrélations étroites entre les grands écrivains et leur engagement politique mais je reste persuadée que leur convergence est finalement nuisible.
On voit d’ailleurs les confusions que cela peut créer dans le lectorat : Je ne lis pas cet écrivain parce que c’est un « fasciste », « antisémite », « raciste » ou tout simplement parce qu’il est de « droite ». Cela ne fait que créer des polémiques périphériques, parasites à l’essence de l’œuvre en elle-même et crée une tourmente autour de la personne de l’auteur, où la dimension littéraire est aux oubliettes. Les scandales récents en attestent (ceci dit certains semblent le rechercher sciemment).

Le même constat s’applique aux médias. Je n’ai jamais compris en quoi le fait qu’un journal soit dit « de gauche » ou « de droite » ou « catho » ou d’une quelconque obédience religieuse, changeait quoique ce soit à ses critiques littéraires par ex (à ses pages politiques et économiques, oui évidemment).

Je les lis de la même façon, indifférente à toutes ses revendications réelles ou supposées.
Il me semble que cela relève d’une autre sensibilité que l’appartenance à un parti et que l’un n’influence pas l’autre.

La récupération des artistes (et plus récemment des « intellectuels ») par les politiques en soutien à leur campagne a déjà montré les conséquences néfastes d’un tel rapprochement…

J’irai même plus loin de façon générale, je crois que la prise de parole d’un écrivain (romancier) sur un sujet autre que le champ littéraire et même encore plus précisément à sa propre œuvre (devenir son propre commentateur en le paraphrasant et en l’explicitant alors qu’il devrait normalement se suffire à lui-même), peut nuire à son travail et le brouiller aux yeux de son lectorat, même si j’avoue que certaines interviews sur la création/genèse littéraire sont passionnantes et que je m’en délecte bien souvent (voir à ce sujet l’humeur : Les écrivains doivent-ils vraiment écrire leur blog ?). C’est ce que disait d’ailleurs Hemingway: “En tant qu’écrivain, j’ai parlé trop longtemps. Un écrivain doit écrire ce qu’il a à dire et non pas parler.”[Alexandra Galakof]

* Depuis, Régis Jauffret a même dévoilé en filigrane dans Libération, son soutien potentiel à François Bayrou (ce qui n’a pas manqué d’éclipser complètement son dernier opus « Microfictions » dans l’esprit des lecteurs !).

Complements sur le même thème:

La perception de Paul Auster sur l’engagement politique de l’écrivain

L’opposition de la politique et de l’écriture par Arnaud Cathrine

Ajout du 11 juin 2009 : Les ravages de l’amalgame littérature et politique: Milan Kundera, une victime de plus

42 Commentaires

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  1. De toute façon, en 2007, jusqu’en mai, la campagne électorale aspirera tout… Comment ne pas "faire de la politique" dans ces conditions?

  2. Elle aspire déjà tout ! 🙂

    Toutefois, je n’appelle pas à ignorer la scène politique ou la campagne électorale mais à ne pas tout mélanger. Par exemple, je ne me verrai pas ni moi ni personne du Buzz littéraire afficher nos préférences ou opinions politiques. Ce n’est pas le lieu. Il y a écrit "Buzz littéraire" là haut pas "Buzz politique", c’est cet amalgame (au profit de la seconde) qui est fait en général et que je regrette.

    • folantin sur 16 février 2007 à 13 h 20 min
    • Répondre

    Pour dissiper un malentendu, je ne suis pas du tout érudit, je suis un infâme groupie et comme tel j’ai accumulé une connaissance encyclopédique absurde sur l’objet de mon idolâtrie.
    Donc il m’apparait que régis est un bon bourgeois de gauche, ce qui ne m’enpêche pas d’être d’accord avec toi sur les rapports politique/littérature.
    Il y a deux manières différentes d’être un bon bourgeois de gauche.
    Lorsqu’il écrit, au détour d’une page (dans Asiles de fous) "Nous laissons l’amour à ceux qui n’ont rien, et d’ordinaire pas même l’amour, aux solitaires, aux démunis, aux laissés-pour-compte, aux rêveurs incapables de bâtir une union médiocre mais durable, et trop impécunieux pour acquérir avec régularité suffisamment de biens de consommation, de signes extérieurs de jouissance, pour se passer de ce truchement irréel, fascinant, tendre ou passionnel, que les multinationales utilisent pour vendre leurs produits", il apparait comme ça, incidemment, que Régis est légèrement critique avec les valeurs de la civlisation dite de la mondialisation libérale. C’est une opinion, qui peut coïncider ou pas avec les miennes ça n’a pas d’importance. Ni de pertience en soi. En revanche il me semble trouver une forme de pertinence littéraire assez évidente dans cette phrase, qui rejoint les raisons pour lesquelles je l’apprécie.

    Quand en revanche, au lendemain du 21 avril 2002, je l’entends sur France Inter appeler à voter Chirac avec des trémolos dans la voix J’ai envie de lui taper la tête contre les murs. Non pas que je sois lepéniste, mais je trouve grostesque de voir ce type a priori intelligent succomber lui aussi à la posture de l’intellectuel/ prédicateur/ leader d’opinion. Qui en définitive répète les lieux communs que le journaliste interviewer lui sussure à l’oreille.

    • folantin sur 16 février 2007 à 13 h 28 min
    • Répondre

    Ceci dit, une tendence lourde de la pose littéraire actuelle, qui effectivement n’est guere représentée sur ce site, consiste à afficher ses opinions politiques politiquement incorrectes. Pour mieux vitupérer contre l’omerta que font subir les grands médias a ton oeuvre géniale (ouais, comme rebatet et brasillach tes grands modèles).
    A noter sur le sujet l’excellent site consanguin.blogspot.com/ presque intégralement consacré a la vie et l’oeuvre de Kersan et Ascencio, les pit et ric de la littérature d’aujourd’hui.

  3. Un roman politique peut-il être une œuvre littéraire ? A vous lire, il semble que non :
    (je cite) : "Littérature et politique n’ont rien à faire ensemble et que leur "mariage" est même dangereux pour la création littéraire."
    Cette réaction m’interpelle à plusieurs titres.
    En premier lieu, je suis plutôt convaincu que « tout est politique ». Par exemple un roman d’amour est politique : il magnifie (d’une manière ou d’une autre) l’existence du sentiment amoureux. Hors toutes les sociétés ne sont pas favorables à ce que l’amour entre en ligne de compte dans la conduite individuelle d’une personne. Un roman d’amour dans un pays privilégiant les mariages arrangés est un roman politique. Et l’on peut multiplier les exemples…
    En deuxième lieu, dénier à la littérature la possibilité d’être un acte politique c’est renvoyer Germinal en des lieux insoupçonnés…
    Je comprends que l’on puisse trouver que le rôle du roman ne soit pas de porter un message politique. Et bien que « tout soit politique, donc», on peut préférer les romans complètement déconnectés du réel. Mais à mon avis, même la sciences fiction est politique (prenez « Fondation » ou « le meilleurs des mondes » ou 1984…. SAS est politique, le dernier ouvrage des éditions Arlequin est politique (dans sa présentation des rapports Hommes /Femmes)…
    Bref ce que je comprends c’est que la littérature aurait le droit de faire de la politique sans le dire, mais si elle le dit, alors elle n’est pas littéraire.
    Au total, je ne sais pas s’il faut vraiment « lire utile », mais il m’apparaît, en tant qu’auteur, que vouloir écrire un roman ouvertement politique ne devrait pas le faire exclure, parce que politique, du champ littéraire. A moins de faire du Pierre Bayard et de parler des livres que l’on a pas lu. Ceci dit, la controverse est intéressante !

  4. Le danger, c’est quand le romancier fait de la propagande ; là, on sort de la littérature, ça n’a aucun sens, c’est nauséabond et ça s’appelle " Bagatelles pour un massacre ". Mais il ne faut pas pour autant nier le rôle social de la littérature. Elle est aussi là pour mettre le doigt sur ce qui ne va pas. La réalité ne doit pas être désertée par les écrivains… C’est ce qui fait toute la force des " Vivants et les morts " de Mordillat ", ou des " Derniers jours de la classe ouvrière " d’Aurélie Filipetti (très (trop?) active dans la campagne de Ségolène Royale, soit dit en passant) : Ces romans sont politiques, sociaux, mais pas militants.
    (bon, j’espère avoir été clair…)

    • marinette sur 16 février 2007 à 18 h 09 min
    • Répondre

    votre blog est génial mais en voici un autre génial également (attention, c’est épicé !!) :
    http://www.leschauffeursdelimousinepensentaussi.blogspot.com

    • folantin sur 16 février 2007 à 21 h 10 min
    • Répondre

    ok "tout est politique". Mais la question n’est pas de savoir si le livre témoigne des opinions politiques de l’écrivain comme ses selles peuvent témogner de ses habitudes alimentaires. A ce titre, l’intentionalité politique demeure un très bon critère pour distinguer la merde. Tu fais bien de citer Zola d’ailleurs. Germinal est un pensum scolaire et je ne connais personne qui lise sérieusement ses évangiles républicains. Me semble que toute l’oeuvre de zola peut se ramener à cette pente fatale : le message politique qui s’écoute en même temps qu’il s’énonce.
    Et à l’autre bout du spectre, la pose des idées généreuses a engendré la pause de la subversion. Il n’y a pas un sou de convictions politique profonde chez les subversifs actuels, mais un rapport mimétique à l’ombre des aînés maudits. Nabe, c’est Christian Clavier dans le rôle de Céline. H24.

  5. Bon, ok tu n’aime pas zola, c’est ton droit. J’aurai pu proposer Malraux et "la condition humaine" qui, à mon sens, est une vrai oeuvre literraire , politique et…intentionnelle. Donc on peut penser que l’intention politique est un bon critère scatologique, mais ça se discute !
    Sur Nabe et Céline, j’aime ton rapprochement. Et la subversion en littérature, comme en politique, semble en effet avoir disparue. Mais justement, cette absence commune,n’est peut-être pas tout à fait dénuée de lien de causalité.

  6. Je dirai plutôt que tout travail littéraire est intrinsèquement politique d’une façon profonde et très engagée (cela devrait se voir même sans les "connaissances suffisantes pour disserter dans le détail"), et que c’est de sortir de là pour aller dans l’arène politique politicienne, tellement pauvre, tellement simpliste, tellement caricaturale qui est en effet ridicule et décevant, souvent, de la part d’un écrivain.
    C’est en substance la position modestement défendue par Claude Simon, par exemple, contre Sartre.

  7. Merci à tous pour vos réactions intéressantes.
    J’ai bien conscience de toucher ici un point sensible (c’est chouette : je ne me suis pas faite insultée !).
    Il y a en fait deux dimensions dans mon billet. La première porte en effet sur le fond du roman en lui-même et la seconde sur l’implication directe de l’écrivain sur la scène politique.
    Deux dimensions qui entretiennent parfois des liens.
    Vous avez réagi plus particulièrement sur la 1e (dois-je en déduire que vous me rejoignez sur la seconde ?). J’ai porté un regard très personnel sur cette tendance et ce discours ambiant selon lequel le roman doit -nécessairement- s’ouvrir sur le monde au sens de ses enjeux politiques et sociaux. Je ne suis pas "contre" même si à titre personnel ce n’est pas ce que je recherche, tant que cela ne devient pas la finalité même du roman.
    Je pense par exemple au roman de Christian Authier ("Enterrement de la vie de garçon") où l’époque ("les années Mitterrand") est évoquée en arrière-plan, finement et avec subtilité.
    buzz.litteraire.free.fr/d…
    Mais quand on sent que l’auteur entre dans la démonstration ou l’explication et veut faire passer, souvent bien lourdement, ses idées là j’estime qu’on est plus dans le champ romanesque ni littéraire.
    Cf mon exemple sur Boulin. On pourrait sans doute citer Dantec aussi.

    Roth et Wolfe sont aussi assez lourds je trouve aussi lorsqu’ils entrecroisent leurs intrigues avec le contexte politico-social mais ils parviennent tout de même à rester romanesque et à ne pas se laisser vampiriser.

    Orwell a particulièrement bien réussi cet exercice périlleux de mêler politique et roman : "1984" et "La ferme des animaux" sont deux vrais romans (et chef d’œuvres) littéraires qui possèdent aussi une puissante résonance politique.

    Pour reprendre l’exemple que tu donne des "Derniers jours de la classe ouvrière" d’Aurélie Filipetti, je préfère par exemple lire son deuxième qui me semble davantage être dans une fibre romanesque (Un homme dans la poche).
    Soit dit en passant je viens de tomber sur son blog
    http://www.aureliefilippetti.org...
    Elle n’y va pas de main morte en effet côté soutien politique !

    Olivier tu dis "Tout est politique", oui par extrapolation ou interprétation plus poussée.
    Ex : l’extrait donné par Folantin (de mémoire ??!!) de Régis Jauffret où l’on peut laisser libre cours à ses déductions sans que l’auteur n’ait rien dit clairement finalement.
    Je pense aussi spontanément à L’étranger de Camus, écrivain engagé s’il en est, qui peut donner lieu à plusieurs lectures, l’histoire humaine, la tragédie d’un homme à proprement parler qui fonde toute sa valeur romanesque et le sens politique (et philosophique) de son destin mais qui ne vient qu’en second, en surimpression en quelque sorte.

    Je parlais dans mon billet des romans qui se revendiquent "politiques" en tant que tels, au premier degré du terme et entre alors dans "l’arène politique politicienne" pour reprendre l’expression très juste de Berlol.

    Et chapeau Folantin pour avoir osé "toucher"à Zola !

  8. PS : Au fait, que pensez-vous de l’initiative du Matricule des anges et du site "Ecrivains en campagne" ? Je serai curieuse d’avoir votre avis…

    • folantin sur 17 février 2007 à 17 h 08 min
    • Répondre

    "écrivains en campagne", c’est l’exercice du billet d’auteur (par truc qui publie machin chez bidule) soit la même chose que la semaine de suzette dans libé. La politique comme prétexte à un exercice de style, qui pourra aller de l’éditorial à la poésie. Ce qui en soit me semble être la façon dont, déontologiquement, un écrivain peut aborder la politique : un sujet. Comme la corbeille de fruits du peintre. Pour filer la métaphore, ceux qui assurent que la littérature doit être politique me font penser à ces soutanes qui affirmaient que la peinture devait véhiculer la parole de notre seigneur jésus. L’écrivain manipule des mots, le cas échéant des idées. Ca ne fait pas de lui le porteur d’une vérité transcendante de nature à éclairer la foule des pauvres électeurs mortels qui compulsent son oeuvre comme le talmud. Sinon faut y aller carrément, avec des blogs du genre de machine fillippeti. Enfin je ne la connais pas, elle a peut être fait de bons bouquins par ailleurs, mais son truc c’est du niveau d’un blog ump de loic lemeur. On est à 100 000 lieues de quoi que ce soit en rapport avec la littérature là. Enfin elle en est surement consciente elle même, mais c’est quand même problématique. Justement il y a quelques temps, suite à un pari à boire, je me suis fadé le bouquin d’Alain Soral "CHUTe !". Bon ça n’est un livre que si on entend par livre une certaine manière de relier entre elles des feuilles de papier. Mais justement le je m’en foutisme de l’écriture est assumé et pratiquement revendiqué au nom de "l’urgence" de l’engagement politique.

    • folantin sur 17 février 2007 à 17 h 20 min
    • Répondre

    où je disais du mal du bouquin de soral alainsoral.frbb.net/Soral…

  9. J’apprends souvent à mes élèves en quoi tout art est politique : politique au sens large, bien sûr. T. Guichard du Matricule, je crois, a voulu qu’on réfléchisse à ce "sens large" de la vie de la vité, qui est justement évacué dans la campagne des présidentielle. Ce n’est pas un exercice de style de plus (dans un blog, on s’exprime pas en cherchant le "style") mais au contraire essayer de reposer ce qui devrait être au coeur de la campagne, autre chose que de savoir où on sont les sondages (par exemple la place de la culture dans notre société).

    Trouvant cette initiative intéressante, j’ai réfléchi à un texte et je me suis posée une autre question encore, Alexandra : en quoi l"opinion d’un écriavin est-elle plus "importante" qu’une autre ? Et ça m’a fait repenser à une vieille histoire, dont je garde encore la rancune, dans laquelle un "écrivain" abusait, à mon avis, d’un pouvoir etd ‘un aura qu’il ne méritait pas… ce qui est aussi, finalement une question de société : à qui tend-on le micro ? Pourquoi ? Je ne sais pas encore si ce texte va passer dans ce blog…

    Enfin, pour moi il me semble quand même que, écrire, ou plutôt publier, est politique, chaque histoire est porteuse de questions qui interroge le monde dans lequel on vit non ?

  10. Pardon c’est parti trop vite, y’a des fautes… mais surtout je voulais dire : on interroge le monde et on publie… donc on espère un retour, un débat sur ces questions du monde.

  11. Le fait de dire que tout est politique en 2007 ne veut pas forcément dire qu’il FAUT faire de la politique.

    Mitterand (par ailleurs grand lecteur) avait lancé la mode des meetings pleins de "people".
    Désormais, tous les candidats ont besoin de poser à côté de chanteurs, d’acteurs, d’intellectuels, d’écrivains, etc.

    De même beaucoup se verraient bien en conseiller du Prince (au hasard, Soral avec Le Pen…)

    Il y a aussi le problème qu’à chaque fois qu’un livre sort, on demande à son auteur: "Pour qui tu vas voter?"
    Et que l’on va essayer de voir, dans son roman sur une histoire d’amour dans l’Inde du XVIIe siècle, un soutien implicite à tel ou tel candidat…

  12. « Pour filer la métaphore, ceux qui assurent que la littérature doit être politique me font penser à ces soutanes qui affirmaient que la peinture devait véhiculer la parole de notre seigneur jésus. »
    > J’adhère à 100% : Et je conserve précieusement la métaphore !

    Oui Emmanuelle politique au sens (voire très très) large, je visais ici politique au sens politicien.
    Il me semble que ce blog "Ecrivains en campagne" se situe plutôt dans cette 2e sphère, ce qui me semblait dangereux… Mais si je comprends bien on t’y lira bientôt alors ?
    Quant à la question de l’opinion de l’écrivain, elle est souvent intéressante car il y a la richesse de sa réflexion et ses mots qui la traduisent si bien. Beaucoup n’ont pas les mots pour exprimer leurs idées. Toutefois, l’écrivain n’est pas un porte-voix à mon avis, juste un citoyen parmi d’autres, et sa création artistique pourrait s’en trouver biaisée s’il se met à assumer ce rôle. Et le dérapage est vite arrivé…

    Je citerai en complément Bukowski qui revendiquait dans ses Contes de la folie ordinaire son désintérêt pour "la politique et les grandes affaires internationales" dans une nouvelle intitulée "La politique est l’art d’enculer les mouches".
    Ou encore dans Women où il revendique de n’avoir "aucun dieu, idée ou opinion politique à défendre"…

    PS Folantin : tu es amateur d’Alain Soral sinon ?

  13. Non, justement ce blog entend la potilique au sens "large", c’est ce qui est dit dans la présentation (appelée "la vie dans la cité") : http://www.lmda.net/blog/?page_i... et c’ets justement celle qui est exclue des débats sur la présidentielle. Enfin moi c’est ce que j’ai compris et c’est pourquoi j’ai écrit ce texte indirectement poltique si tu veux…

    Je te donne un exemple personnel : dans ce livre que je viens de "sortir" il y a, d’après certains, trop de "nature", il est clair que derrière il y a des revendications "écologistes" et que je suis une vraie "écolo" et pourtant, je ne vais pas voter pour le parti officiel des écolos, et aussi je dénonce haut et fort l’arnaque N. Hulot. Il n’empêche que si on comprend, en lisant ce livre, qu’il y a une revendication sur l’aménagement du territoire, et bien sûr sur l’acceptation de la transexualité, on aura raison, mais ça ne veut pas dire : Emmanuelle va voter voter "vert" ou "communiste".

    Tout-à-fait d’accord avec toi, l’écrivain est un citoyen comme les autres… et il arrive ces temps ci que les "autres" (ex "la ménagère de moins de 50 ans" que je suis aussi!) aient beaucoup de place pour "parler", donc aussi une place pour les écrivains mais ni plus ni moins.

    • folantin sur 19 février 2007 à 23 h 50 min
    • Répondre

    Je viens de lire ton texte, effectivement tu prends une définition extensive du mot : "Au fig.
    Un orateur, un écrivain bat la campagne. ,,Il dit beaucoup de choses hors de son sujet«  (TLF sic)
    Sans doute ce pauvre écrivain a voulu ne pas envenimer les guerres pichrocolines du vercors en repompant la psychanalyse des contes de fées. Mettons qu’en termes politiques, il a joué la diversion de la 3e voie. Dommage que ça se soit fait sur le dos de ton fils.
    PS : non je ne suis pas "amateur" de soral. Je vois en lui au contraire une espèce de symptôme de ce que les médias et la politique peuvent produire de pire, dans le domaine de l’écriture (voir le bousin que j’ai chié sur son forum)

  14. Justement, tu vois il ne s’agissait pas de guerres "locales", de "petites" guerres mais de questions de société essentielles (racisme, écologie, tolérance, territoire, etc) et ce type n’a pas exercé son "pouvoir" que sur le dos de mon fils mais sur des tas de dos, pendant des années. C’est une attitude répandue que je voulais dénoncer : celle de certains intellos (écrivains, profs, journalistes…) qui ont une posture colonialiste, qui s’évertuent à vouloir changer la langue et les habitudes de l’autre, et c’est politique.

    Ici même je me suis un peu pris la tête avec Alexandra sur les notions d’urbain, de moderne etc, car le centralisme de Paris et plus généralement des villes par rapport à la pensée des "ploucs" est une des données de cette campagne (voir Bayrou, qui du coup se pose en "provincial", qui parle de soit-disant la supériorité des journaux de province, ce qui est faux d’ailleurs, passons) et c’est aussi une des données du milieu éditorial, de la littérature contemporaine.
    Or je le répète : nous n’avons pas besoin de "colons savants" pour nous "éduquer", juste de services publics de proximité.

    Ps : d’accord avec toi sur Soral, il est un pur produit médiatque.

    • folantin sur 20 février 2007 à 13 h 26 min
    • Répondre

    "posture coloniale" tu y vas carrément. Je veux bien que le recyclage de clichés freudiens ne soit pas de très bon goût, mais qu’aurais tu espéré à la place ? Ne pense tu pas qu’un pladoyer en faveur des plantigrades et contre le racisme n’aurait pas été perçu par certains "autochtones" comme une manière de se voir faire la leçon par le type de la ville ?
    Plus généralement c’est ce qui me semble problématique dans l’engagement politique de l’écrivain (ou de l’artiste), cette habitude de faire écho à des clivages parfois assez anecdotiques, et au lieu de les résoudre, d’en faire au contraire des lieux de polarisation extrème de la société. Il me semble que notre conception de la politique, aujourd’hui est polluée par un nombre considérables de clivages parfaitement absurdes : il faut savoir si on est "pour" ou "contre" la corrida, le clonage, le gavage des oies etc…
    Ce qui est parfaitement surréaliste, c’est que tout un chacun se sent tenu d’avoir une opinion la dessus, et parfois sera pret à la défendre avec virulence. En définitive, ces opinions politiques se diffusent exactement comme des habitudes consumméristes, sous l’action de leaders d’opinon autoproclamméns au nombres desquels malheureusement les écrivains.

  15. …non, je n’y vais pas trop fort car je connais cette tentation "colonialiste" de la maîtrise de langage (en tant que prof et écrivain, justement) et là je parlais plutôt du fait qu’il déforme l’écriture des gamins, qu’il la rende inintelligible à force de maniérisme de "style".

    …sinon, sur les clivages, et les opinions poltiques comme des objets consummériste, là je suis tout-à-fait d’accord avec toi.

  16. Désolée pour les fautes

  17. Emmanuelle, j’ai regardé la présentation du blog mais je n’y vois pas vraiment de sens figuré… Il est dit : "Que pensent-ils de la manière avec laquelle les médias nous informent. Qu’attendent-ils des débats politiques ? Que leur inspirent les soubresauts de la campagne ? Quelle société veulent-ils pour demain ? Quels engagements paraissent pouvoir se marier avec leur travail d’écrivain ?"
    Cela me semble viser une réflexion politique-politicienne au sens propre et premier du terme.

    "Je te donne un exemple personnel : dans ce livre que je viens de "sortir" il y a, d’après certains, trop de "nature", il est clair que derrière il y a des revendications "écologistes" et que je suis une vraie "écolo" et pourtant, je ne vais pas voter pour le parti officiel des écolos, et aussi je dénonce haut et fort l’arnaque N. Hulot. (..) mais ça ne veut pas dire : Emmanuelle va voter voter "vert" ou "communiste"."
    > Oui voilà c’est ça, c’est cette politisation de la scène et de la création littéraires qui m’inquiète. Si je lis des descriptions poignantes de nature par ex, jamais je n’irai faire un quelconque rapprochement avec les Verts ! De tout temps la nature a inspiré et exalté les écrivains ou les poètes.

  18. Folantin, concernant Soral, ton post est-il le message initial signé " –8<-" ?
    Par ailleurs as-tu lu d’autres ouvrages de Soral à part la Chute et qu’est ce qui t’as poussé à t’intéresser à cet auteur si ce n’est pas indiscret ?
    Même question à Emmanuelle tant qu’on y est… 😉

    Mon ami (en bon miso !), avait acheté son bouquin "Sociologie du dragueur" à l’époque…

    Autre question : que pensez vous de la position de Dantec ?

  19. Je signale aussi deux liens intéressants :
    L’avis (bp plus sévère que moi !) de Tabula Rasa qui tient un blog littéraire de haute qualité qui a réagi à ce billet sur son blog et que je viens de lire dans la Buzz-list :

    Citation : "On relance donc le débat : politique et littérature, un ménage heureux ? La réponse est non (…). La vérité, c’est que l’écrivain connaît aussi bien la politique que moi, vous, la crémière et monsieur le notaire. Lorsqu’il en parle, il étale avec une incroyable dose d’auto-satisfaction, son ignorance absolue, matinée de la certitude d’être quelqu’un et donc de parler sagement. Oui, lorsqu’il l’ouvre, c’est pour mieux nous montrer le vide et ses belles caries. Mettre son avis sur un piédestal, c’est aussi ridicule que de demander l’opinion de Zinédine Zidane ou de Miss Bol d’Or. Laissons ce genre d’illusion à d’autres. Les littérateurs et la politique n’est en fait que la version cultureuse du micro-trottoir, cette pratique journalistique dont le mécanisme fascinant est à peu près celui de la moto ramasse-crotte.

    La littérature est une maîtresse exigeante, et ses practiciens se doivent d’y consacrer la plupart de leur temps. Je vois d’ici la larme dans les yeux de certains lecteurs, émus par le souvenir de l’écrivain dans la cité. Séchez-les, chers amis : le plumitif se souciant trop de politique signe en fait un pacte avec le diable qui assèche son œuvre fictionelle. Que l’écrivain écrive, le lecteur lise, le citoyen citoyenne, et le politique exécute ses basse œuvres ! Amen."
    Article complet ici : table-rase.blogspot.com/2…
    (> j’aime tout particulièrement le second paragraphe même s’il est virulent !)

    Et aussi un dossier littéraire "La littérature noire de rage" :
    http://www.surlering.com/article...

  20. Et enfin pour finir (!), j’ajoute un truc qui me paraît symptomatique.

    La présence au salon du livre prochain d’une "Terrasse Politique"
    http://www.salondulivreparis.com...

    J’attends vos avis si vous en avez le temps…

  21. Mon avis, Alexandra, c’est que j’évite d’aller au salon de Paris et donc je vais à Bédarieux (34) à la place… et ce dont tu nous informes (terrasse politique) c’est que écrivains ou pas, on nous saoule avec un débat politique qui n’en ai pas un, qui est en fait une guéguerre médiatique.

    Soral, pas lu parce que le personnage m’insupporte, et je t’avoue que ceux que je lis sont très peu "médiatisés". c’ets un choix de ma part, et pour l’instant je m’en trouve très bien, je me régale comme lectrice.

    • folantin sur 21 février 2007 à 13 h 48 min
    • Répondre

    Soral, il y a de ça un an je croyais que c’était un genre de chroniqueur télé free lance, qui comme tout irradié du poste avait publié deux trois livres. Des essais sur la mode ou le féminisme… bref typiquement le genre de sujets polémiques/ politiques dont je me fous éperduement. Et puis je suis tombé sur une interview dalymotion où, justement, il débinait Dantec et la bande bouffonante de Ring (http://www.dailymotion.com/visit...
    Bon ok ça ne volait pas haut, c’était même très méchant, mais servi avec une telle gouaille que je me suis laissé à cliquer de liens vidéos en liens vidéos (il en a fait énormément)… jusqu’à imaginer qu’à l’écrit, il pouvait en rester quelque chose.
    Et en fait non.
    Soral avec un stylo n’approfondit pas ses idées d’avantage qu’avec un verre de beaujolais à la main, et perd tous ses moyens spécifiquement oratoires.
    Moralité on peut être un compagnon de beuverie décent sans avoir nécéssairement le talent d’un écrivain. Comme disait l’autre "c’est une ascèse".
    Mais je crois aussi qu’il y a un rapport de la forme au fond. Un contexte pour chaque type de propos. En compagnie d’un ballon de rouge et de quelques convives, je comprends très bien qu’on vitupère contre sarko, royale, les pouffiasses féministes ou les connards misogynes. C’est une manière de passer le temps. Bizarrement, quand je passe du temps en compagnie d’un écrivain, je suis plus exigeant qu’avec de simples potes.

    • Sido sur 21 février 2007 à 16 h 07 min
    • Répondre

    Je suis d’accord sur la politisation polluante de la place littéraire.
    Les livres des politiques mangent peu à peu de la place aux romans. Il n’a qu’à voir les succès d’édition comme témoignage de sarkozy ou auparavant la pseudo polémique de Giesbert de la tragédie du président qui sont de plus traités dans les rubriques livres des médias et rongent encore un peu plus l’espace congru alloué à la littérature.

  22. C’est marrant parce que j’ai un ami libraire spécialisé dans les sciences humaines. Il pensait que les livres types témoignange de Sarko etc allaient être des titres porteurs financièrement, ceux qui allaient lui garantir une poire pour la soif. Eh bien, non! Il n’en vend pas un seul. En fait, ces titres bouffent l’espace médiatique et son correspondant commercial: les grandes-surfaces. Ils ne touchent ni les revues de qualité, ni les libraires spécialisés. Dommage qu’ils "volent" du temps d’antenne "mainstream" à des titres plus littéraire, ça c’est certain.
    Le problème est en effet que les émissions donnent de plus en plus de place à des livres de non-écrivant – alors qu’on passe son temps à demander les opinions politiques des écrivains. Oui, oui, drôle de monde…

  23. Réponse musclée de Folantin ! Quand je te lis ou que je lis le billet de Fausto (Tabula rasa) par ex, c’est là que je réalise que je suis une vraie "bisounours" et dire que j’ai toujours peur d’être trop tranchante !
    J’ai d’ailleurs beaucoup hésité à publier ce billet à l’heure où l’on encense le "tout politique".

    Bref, pour revenir à ce que tu disais sur Soral, il est vrai qu’on a souvent de grandes attentes face aux écrivains que l’on admire ou apprécie et qu’hélas dans 95% des cas la déception est à la hauteur de l’attente. C’est la raison pr laquelle j’essaie de me tenir le plus éloignée des auteurs que j’apprécie !
    Autre constat que je partage : eh oui bien souvent les écrivains les plus doués à l’oral sont ceux qui sont assez piètres à l’écrit (et vice versa, je l’ai aussi remarqué à plusieurs reprises, sans pour autant en faire une régle générale ).

    A lire aussi ce billet qui ne pousse pas plus que ça l’analyse mais qui me semble intéressant sur le thème. Le journaliste s’interroge sur cette question : Le manga est-il de droite ?
    livres.fluctuat.net/blog/…

  24. Sido, merci de ton avis.
    Tu abordes un autre volet de cette problématique qui est aussi très symptomatique effectivement.
    D’ailleurs je me demande si ce n’est pas ces succès d’éditions de livres d’hommes politiques ou d’analyses politiques qui poussent les romanciers à vouloir leur embrayer le pas en faisant des "politiques fiction" comme je les appelais.
    C’est triste…

  25. Une autre réflexion me vient à ce sujet. Comme je le développais plus haut (en citant notamment Orwell), il ne s’agit bien sûr pas de confisquer l’inspiration de l’auteur en lui interdisant le contexte politico-social mais plutôt de réussir à le dépasser et le transcender (ce qui on l’observe semble difficile pour les auteurs contemporains) et non pas de le copier pâlement sans réelle consistance littéraire ou romanesque. Il doit rester une source d’inspiration comme une autre et n’a en aucun cas un caractère systématique. Les auteurs n’ont pas d’obligation d’engagement politique à travers leur oeuvre !
    La même logique s’applique au monde économique. On le voit certains jeunes romanciers parviennent avec brio à s’emparer de certaines problématiques et à créer de superbes romans. Celui qui me vient immédiatement à l’esprit "Les actifs corporels" de Bernard Mourad qui m’a vraiment bluffé. Il n’est pas tombé dans le piège de faire du powerpoint ou de réciter Les échos.
    buzz.litteraire.free.fr/d…

    • virgule sur 26 février 2007 à 10 h 10 min
    • Répondre

    C’est marrant parce que justement David Foenkinos a été victime de ce genre de critique sur ses romans sur le "manque de réflexion sur la politique" ou qu’il n’y avait pas "de sujet de société". Il a bien fait de ne pas écouter ce type de commentaire et de continuer à ne suivre que la seule chose importante pour un écrivain : son inspiration!!

  26. Merci Virgule ! C’est dingue que l’on en soit arrivé à lui faire ce genre de reproches, cela démontre vraiment l’étendue du malaise actuel !

    J’ai depuis découvert pas mal d’initiatives qui illustrent cette convergence accrue entre littérature et politique (politicienne) qui prend une ampleur inquiétante. Un sujet vraiment au coeur de l’actualité et qui gangrène le roman sous cette forme étrange de "politique fiction".
    Compléments d’infos sur cette "tendance" :
    Deux romans récents à regarder :
    Quartier Bleu de François Darnaudet qui imagine "un état sarko-gaulliste" "remplissant à la lettre le cahier des charges "politique-fiction" et où le message politique à délivrer prime… (voir la critique : http://www.actusf.com/php/modify...
    Ce roman a été publié dans la collection de politique fiction de Jérôme Leroy aux éditions du Rocher.
    Le genre s’affirme désormais à part entière il semblerait.
    Voir son itv : http://www.actusf.com/php/modify...
    Citation : "La ligne directrice de la collection est simple : à travers le format de la Novella qui est historiquement lié au genre, j’ai voulu retrouver cette SF « adulte » des années soxante-dix qui se voulait une littérature d’évasion mais aussi une littérature d’intervention, au sens politique et contestataire du terme."

    Et pour finir, j’ai repéré ce roman de Xabi Molia, « Reprise des hostilités », qui vient de sortir et semble aussi surfer encore sur ce créneau de politique-fiction déguisée en roman littéraire. Il donne quelques éclairages intéressants sur la "littérature messagère" :

    Extrait itv Zone littéraire : Le thème du politique, sous-jacent dans les précédents romans, est central dans celui-ci avec le personnage de Bel, un populiste en puissance. Faut-il voir dans votre livre une sorte de manifeste ou du moins de mise en garde à l’intention des candidats actuels ?

    Non, je ne crois pas qu’il y ait quelque chose de l’ordre du message, ni de la prophétie car je ne crois pas que, actuellement, l’écriture ait tant de pouvoir. Quand la littérature est messagère, elle a d’ailleurs tendance à m’ennuyer. Mais j’ai été interpellé par deux faits politiques qui m’ont fait réaliser qu’il se passait des choses dont il me semblait important de rendre compte : le retour et la métamorphose d’un certain populisme qui est beaucoup plus insidieux, masqué, mais qui possède une certaine légitimité parce qu’il se coule dans des formes respectables.
    En France, j’avais été particulièrement frappé par les alliances qui avaient été faites au moment des régionales du milieu des années 90 entre la droite traditionnelle et l’extrême droite pour gagner des conseils régionaux. Ensuite, il y a la droite de Berlusconi, qui est populiste, incohérente. A la différence des fascistes, ce ne sont pas des idéologues, mais plutôt des aventuriers de la politique. Ils sondent l’opinion et utilisent des peurs, des désirs, capables d’en changer selon les opportunités – ce qui est le cas de Bel qui essaye d’abord d’exploiter l’image traditionnelle de la France avant de se tourner vers l’art contemporain pour se forger une image plus jeune. La situation que je décris est à l’heure actuelle totalement fictive car il n’y a pas en France une droite populiste qui se situerait entre une droite traditionnelle et une extrême droite beaucoup plus idéologique comme celle de Le Pen. Mais ce genre de partis existe en Italie et dans d’autres pays d’Europe…
    A lire ici :http://www.zone-litteraire.com/e...

  27. Hop et j’ajoute en prime quelques titres de conférences qui seront données au salon du livre résolumment ancré dans la scène politique :

    15h20-16h20
    Les jeunes et l’engagement dans l’écriture
    Parrainé par Dominique Mainard, présenté par Paul
    Fournel et Christiane Baroche, novellistes et membres
    du jury du prix du jeune écrivain
    SGDL
    17h40-18h40

    Ecrire le politique, établir une cartographie littéraire
    du territoire politique
    Avec Grégoire Bouillier et Arno Bertina
    LE MAGAZINE LITTERAIRE

    11h-12h
    Les écrivains et la politique
    Avec Marc Dugain, François Bégaudeau, Marc Lambron
    LE JOURNAL DU DIMANCHE

    Les livres en politique
    Pourquoi une telle production d’écrits sur les
    acteurs de la vie politique ?
    Quel est le marché du livre politique ?
    Animé par Billie
    RADIO NOTRE DAME

    26 mars
    17h40-18h40
    Le devenir politique du roman ?
    Avec François Bégaudeau, Joy Sorman, Karine Tuil,
    Maryline Desbiolles
    LES INROCKUPTIBLES

    ça promet…

  28. Triste!

    • jean sur 16 décembre 2010 à 20 h 51 min
    • Répondre

    "il avait d’ailleurs renoncé au titre "Les limbes" pour son recueil des Fleurs du mal en raison de ses connotations socialistes"

    Vous avez dit cela pour Baudelaire. J’ai essayé de contraster l’information par de nombreuses sources mais mais cela a été sans succès. Puis-je savoir quelles sont ces connotations socialistes?

  29. Je ne sais pas où vous avez cherché mais cela se trouve très facilement sur le web…, voici l’explication :
    A l’époque, le philosophe et théoricien Fourier appelait « périodes limbiques » « l’âge du début social et du malheur industriel».
    Dans la rhétorique socialiste de Charles Fourier, les limbes désignent les temps infortunés précédent l’instauration de la nouvelle ère sociale, toute d’harmonie.
    Baudelaire a donc renoncé à ce titre afin d’éviter tout amalgame avec cette doctrine qui aurait réduit la perspective de l’oeuvre.

    (A noter que la référence biblique au péché originel -distinction entre le bien et le mal- le gênait également)

    • jean sur 19 décembre 2010 à 18 h 14 min
    • Répondre

    merci!

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