Littérature américaine

Fahrenheit 451 de Ray Bradbury : « Here we go to keep the world happy, Montag! »

Fahrenheit 451 de Ray Bradbury publié en 1953, a d’abord vu le jour sous la forme d’une nouvelle (« The Fireman », Le pompier en VF, elle-même dérivée d’une précédente intitulée « The pedestrian », « Le piéton » en VF suite à avoir été persécuté par un policier zélé alors qu’il marchait dans son quartier, on retrouve ses allusions à la marche à pied à travers le personnage de Clarisse, Bradbury n’ayant jamais passé son permis de conduire par méfiance des automobiles) publiée dans un magazine de SF en 1950. Bradbury l’étoffera ensuite sous la forme d’un roman en le tapant dans le sous-sol de la bibliothèque de UCLA à Los Angeles, en louant sa machine à écrire. C’est donc au milieu des livres et dans un lieu qu’il affectionne plus que tout (il revendique son éducation d’autodidacte self-educated faite dans les bibliothèques alors qu’il n’avait pas les moyens d’étudier à l’université) qu’il écrit un roman qui rend justement hommage à ces livres qu’il chérit tant et qu’il craint de voir négliger, tomber dans l’oubli et disparaître.

La conjuration des imbéciles de John Kennedy Toole : « The United States needs some theology and geometry, some taste and decency. »

La conjuration des imbéciles (The Confederacy of Dunces en VO, on pourra d’ailleurs se demander pourquoi la traduction n’a pas conservé l’idée de confédération qui outre la référence à Swift*, fait aussi écho aux états confédérés du Sud pendant la guerre de Sécession) de John Kennedy Toole, fait partie de ces livres cultes dont la légende les précède et finit presque par les écraser. En effet, Toole fait peut-être partie des refusés de l’édition les plus célèbres de l’histoire littéraire, causant tragiquement son suicide quelques années après avoir finalisé son manuscrit en 1969 (à l’âge de 32 ans).

Basketball Diaries de Jim Carroll: « J’ai toujours senti qu’il était possible de trouver de la pureté au coeur de la pire dégradation, une sorte de lumière »

Basketball Diaries est le journal de l’adolescence « sauvage » de Jim Carroll, devenu livre culte de la scène New-Yorkaise underground des années 70 et adapté sur grand écran avec dans le rôle titre un jeune Leonardo DiCaprio écorché vif dont la performance a largement été saluée. A la fin des années 90 alors que se multipliaient les « school shootings » (Heath High School en 1997 et Columbine en 1999), l’auteur a été pris dans une effroyable polémique le rendant responsable, au motif qu’un des auteurs de ces tueries aurait cité son adaptation ciné comme une de ses inspirations (plus d’infos ci-dessous). Héritier de la Beat generation, en particulier Ginsberg, ce fils d’une famille catholique irlandaise, décédé en 2009 à 60 ans, navigua entre la scène pop art (la factory d’Andy Warhol) et rock (the Velvet Ground), avant de fonder le Jim Carroll Band en 1978 en Californie). Dans les années 70, il fait partie des jeunes talents prometteurs aux côtés de ses acolythes, Patti Smith (avec qui il co-écrit les poèmes en prose de « The Book of Nods ») et Sam Shepard.

Moins que zéro de Bret Easton Ellis : Desesperados de luxe à L.A

C’est après Moins que zéro de Bret Easton Ellis, son premier roman et premier coup d’éclat en 1985, qui contient en germe toute la fureur et la folie à venir… que l’auteur écrira en écho « Vous qui entrez laissez toute espérance », la première phrase d’American Psycho, 6 ans plus tard. Une phrase qui répond directement au « Disparaître ici » que le narrateur et (anti) héros du roman, Clay, ne cesse d’entrevoir sur les immenses panneaux publicitaires qu’il croise sur les routes de LA. Le livre a connu un immense succès (il s’en vend 50 000 exemplaires la première année) et propulse son auteur, alors âgé de 21 ans, vers la gloire en parallèle de son « jumeau toxique » Jay Mc Inerney qui venait de publier « Bright lights, Big city » (« Journal d’un oiseau de nuit » en VF), une autre vision de la jeunesse et de la drogue sur la cote Est américaine.

Le bûcher des vanités de Tom Wolfe, Guerre d’egos sur fond de conflit politico-racial

Pavé culte, Le bûcher des vanités de Tom Wolfe reste l’oeuvre phare (et le premier roman) du dandy terrible des lettre américaines. Publié en 1987 et écrit en plein Reaganisme (à l’âge de 57 ans), ce best-seller mondial, porté a l’écran par Brian De Palma (affiche ci-contre), est un portrait en coupe sans complaisance d’une société américaine aveuglée par son matérialisme et sa soif de pouvoir, à travers la chute inexorable d’un golden-boy en pleine gloire.

Fight Club de Chuck Palahniuk : guérilla de cols blancs anti-yuppie, anti-capitaliste, anti-ikea…

Le film choc « Fight Club adapté du livre de Chuck Palahniuk publié en 1996 (d’abord sous forme de nouvelle, le chapitre 6, à l’âge de 34 ans), puis adapté en 1999 par David Fincher, est devenu culte pour un certain nombre de spectateurs/lecteurs de la génération X ou Y. Le livre qui l’a inspiré très fidèlement reste pourtant moins connu. Son auteur, américain (prononcez son nom « paul-ah-nik »), invente ici un nouveau genre à mi chemin entre la science fiction, la fable philosophique, la farce délirante, le roman noir et l’anticipation sociale. Mais aussi roman d’amour, de fraternité, d’apprentissage… D’une richesse et d’une inventivité hors norme, il donne à voir les impasses de nos sociétés occidentales en imaginant les conséquences extrêmes du « système ».

« Tout est illuminé » de Jonathan Safran Foer : « Les juifs ont six sens : toucher, vue, goût, odorat, ouïe… mémoire. »

Estampillé « prodige des lettres américaines » dés la sortie de son premier roman « Tout est illuminé » en 2002, adapté au cinéma par Liev Schreiber (réputation confirmée voire accrue avec la publication de son 2e roman « Extrêmement fort et incroyablement près » en 2005), ce diplômé de Princeton ayant eu notamment pour professeur de creative writing, la romancière Joyce Carol Oates, mariée à l’écrivain Nicole Krauss, marque l’apparition d’une nouvelle génération littéraire américaine. Une écriture inventive, hybride et innovante (aux côtés notamment de Dave Eggers…). L’auteur juif new-yorkais, de Brooklyn (non loin de chez Mister Auster !), explore dans son œuvre romanesque son identité juive et ses racines, sur fond de drame de la Shoah, sous la forme de quêtes initiatiques. « Tout est illuminé » faisait suite à un voyage de l’auteur en Ukraine sur les traces de son grand-père :

« Les vitamines du bonheur » de Raymond Carver, La vie est un long malheur tranquille

« Les vitamines du bonheur » de Raymond Carver constitue une influence et un héritage littéraire revendiqués par de nombreux écrivains français et d’ailleurs: d’Arnaud Cathrine à Olivier Adam, Marie Desplechin, Régis Jauffret, Tanguy Viel, Christian Oster ou encore Philippe Djian… jusqu’à Haruki Murakami, Martin Amis, Jay McInerney ou Salman Rushdie à l’international… Raymond Carver, l’écrivain des rivières et des forêts de l’état de Washington, le « Tchekhov américain » comme l’avaient surnommé les critiques littéraires en raison de la même proximité au peuple qu’ils partageaient.

Virgin suicides de Jeffrey Eugenides : What it feels like for a girl…

« Virgin suicides » de Jeffrey Eugenides, publié en 1993 et devenu culte grâce à son adaptation par Sofia Coppola en 2000, est peut-être l’un des plus beaux romans dramatiques écrits sur l’adolescence au féminin, l’ennui cruel des petites banlieues policées, le corps en métamorphose, la fascination ou encore l’innocence perdue… Son titre est inspiré d’une chanson du groupe « Cruel crux » (dont l’une des héroïnes, Lux, était fan).

Contre-jour de Thomas Pynchon: Un contre-monde (rentrée littéraire 2008)

Septième ouvrage de l’une des plus grandes énigmes littéraires de notre temps, le Contre-Jour de Thomas Pynchon est un roman à énigmes justement, inépuisable, dans lequel on retrouve cette conscience sociale sans faille et chère à l’écrivain. Tous les genres littéraires y sont cultivés, exploités, détournés, pour prononcer une sévère condamnation de notre époque, toujours plus carcérale et politiquement corrompue.

Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley : Un monde sous conditionnement pour une civilisation « zéro défaut »

Ecrit en 4 mois en 1931, « Le meilleur des mondes » d’Aldous Huxley (« Brave New World » en version originale) est tout simplement impressionnant de perspicacité et de justesse quant à la vision qu’il donne d’une société future possible. Dans ce livre culte, l’écrivain britannique Aldous Huxley dépeint une société eugéniste où la natalité serait entièrement sous le contrôle des scientifiques. Où la société serait le résultat d’une production bien huilée, dont chaque constituant serait rigoureusement conforme à un cahier des charges initial.

Contes de la folie ordinaire de Charles Bukowski : la sacro-sainte lucidité de l’homme défoncé et dépravé

> »Contes de la folie ordinaire » de Charles Bukowski est paru en 1972 sous le titre original « Erections, ejaculations, exhibitions and general tales of ordinary madness », ce recueil de nouvelles, très dense, est l’une des pierres angulaires de l’oeuvre du mythique Beatnik, « vieux dégueulasse » ou « pas grand chose » comme il s’autoproclamait. Il fallut attendre la fin de la décennie pour pouvoir se procurer en France ce livre, sous un titre raccourci et surtout plus pudique…

Demande à la poussière de John Fante: « On n’était pas vraiment en vie ; on s’en approchait, mais on n’y arrivait jamais. »

« Demande à la Poussière » (1939) de John Fante constitue le troisième quart d’un cycle autobiographique débuté en 1933 par La route de Los Angeles puis Bandini (1938) et beaucoup plus tardivement de Rêves de Bunker Hill (1982). Fante nous parle de l’intérieur comme personne et fait résonner en nous tous ces êtres perdus, tous leurs désirs et douleurs, toutes ces voix des bas fonds de Los Angeles.

« Mon chien Stupide » de John Fante, Crise middle life sur fond d’irruption canine…

Publié après sa mort, en 1986, « Mon chien stupide » de John Fante (sous le titre original de « West of Rome), fait partie de ses courts récits non intégrés au cycle « Bandini » dont « Demande à la poussière » est le plus emblématique. C’est une œuvre plus tardive de l’auteur, qui même si elle est encore d’inspiration autobiographique, emprunte un autre ton, plus amer et désabusé que ses œuvres de jeunesse.

Journaux de Sylvia Plath 1950-1962 : « Je dois me souvenir, c’est de cette matière qu’est faite la littérature, de cette matière de vie remémorée »

Les « Journaux » de Sylvia Plath montrent le lien indéniable entre la vie et l’œuvre de la poétesse et romancière américaine, devenue une icône à la suite de son suicide à l’âge de 30 ans. L’une nourrissant l’autre et vice versa, participant de la fascination qu’elle exerce. C’est ainsi que ses journaux des années 1950 à 1962 (le carnet relatant les dernières années de sa vie jusqu’en 1963 ont été détruits par son mari Ted Hughes) nous offrent une superbe antichambre de son travail de création littéraire et poétique.

Le maître des illusions de Donna Tartt, Folie et décadence sur fond de campus de Nouvelle-Angleterre et cours de grec

Ecrit en dix ans et publié à l’âge de 28 ans, « Le maître des illusions » de Donna Tartt est un de ces pavés mythiques que les lecteurs se recommandent, par bouche à oreille, d’année en année. Il est l’oeuvre d’une jeune Américaine, née à Greenwood, Mississippi, écrivain précoce, publiant ses premiers poèmes à treize ans et camarade de lycée d’un certain Bret Easton Ellis à qui elle a notamment dédié ce premier roman.

Minority report de Philip K Dick: « L’existence d’une majorité implique logiquement l’existence d’une minorité correspondante. »

minority-Report-livre-philip-k-dick.png« Minority report » de Philip K Dick est un texte datant de 1956 et publié pour la première fois dans la revue de SF américaine « Fantastic Universe », alors qu’il en était encore à ses débuts (avant la 1e reconnaissance arrivée avec « Le maître du Haut château ») : on en admirera d’autant plus la maîtrise narrative, l’originalité visionnaire et la profondeur sous-jaçente qu’elle recèle ! « We can remember for you wholesale » (rebaptisé « Total recall ») arrive en milieu de carrière, en 1966, initialement publiée dans « The Magazine of Fantasy & Science Fiction ».

Ubik de Philip K. Dick : « Le monde entier est-il contenu en moi ? Est-il englobé par mon corps ? »

« Ubik » de Philip K.Dickest un roman culte de science fiction qui n’en finit pas de passionner et de soulever des débats*, tandis que Michel Gondry souhaitait l’adapter au ciné (mais a récemment déclaré « qu’il n’y avait pas les ressorts dramatiques pour un bon film« . Ecrit en 1966, classé en 2005 parmi les 100 meilleurs romans écrits en anglais depuis 1923 par le magazine Time, le critique Lev Grossman l’a qualifié d’« histoire d’horreur existentielle profondément troublante, un cauchemar dont vous ne serez jamais sûr de vous être réveillé. »

Martin Eden de Jack London, « La vie volait haut. Le bonheur de créer, qui était censé n’appartenir qu’aux dieux, était en lui. »

Jack London publie en 1909, « Martin Eden », 7 ans avant qu’il ne meure d’empoisonnement. Considéré comme l’autobiographie romancée (autofiction dirait-on aujourd’hui !) du prolifique écrivain américain, un des précurseurs du « nature writing », et devenu livre culte des aspirants écrivains. L’auteur est alors un écrivain reconnu, notamment pour ses récits d’aventures et de nature sauvage (avec en tête « L’appel de la forêt » et « Croc blanc »), plus particulièrement prisés par la jeunesse.

Le magicien d’Oz de L. Frank Baum : derrière le conte, l’histoire de l’Amérique et de ses pionniers (1/2)

Le magicien d’Oz de L. Frank Baum est moins connu des lecteurs francophones que les contes de Grimm ou d’Andersen (deux influences reconnues aussi par Baum, avec également celle de Lewis Carroll en 1865) ayant souvent bercé notre enfance. Aux Etats-Unis, c’est bien plus que cela : une véritable institution et une histoire profondément ancrée dans son ADN, tout un symbole qui irrigue régulièrement encore sa culture populaire moderne.