« La jouissance » de Florian Zeller, extrait choisi : « Tentative de définition du verbe « vieillir » « 

Avec son titre plus que jamais kundérien, influence majeure de l’auteur depuis ses premiers romans comme « Les amants du n’importe quoi », le cinquième roman de Florian Zeller, publié après avoir signé diverses pièces de théâtre (à succès) dont la prochaine « Le père » sera jouée à partir du 20 septembre, suscite, comme d’habitude des réactions vives, entre ses détracteurs et admirateurs. Sous-titré « Un roman européen », le livre se veut ambitieux en cherchant à relier l’histoire d’un couple trentenaire (passion charnelle, éloignement et rupture) et celle de la construction européenne (enthousiasme, distance, indifférence). Ses deux héros, Nicolas et Pauline, incarnent une génération pour qui la quête de jouissance individuelle prime sur l’idéal collectif (de la famille ou plus largement de la société). Un beau passage, assez pessimiste, à découvrir au sujet du cap de la trentaine :

Extrait choisi, « La jouissance » de Florian Zeller, chapitre 6 :

« A trente ans, il y a théoriquement autant de choses à vivre que de choses vécues, autant devant que derrière soi – c’est à dire : autant d’espérances que de souvenirs. C’est un équilibre précaire qui ne durera pas.
Peu à peu, la masse des souvenirs l’emportera sur celle de l’espérance.
De ce point de vue, vieillir, ce serait le transvasement invisible entre ces deux masses.
Plus on avance, plus l’espérance se fait rare, tandis que la poche contenant les souvenirs devient extrêmement lourde.
Si lourde, en vérité, qu’elle finit par se déchirer.
La mémoire fuit alors de toutes parts.
Elle fuit jusqu’à disparaître complètement.
« 

A lire aussi :
« Avoir trente ans » par Yann Moix (extrait n°2 d’Anissa Corto)
« L’homme de trente ans » vu par Frédéric Beigbeder (extrait de « L’amour dure trois ans »)
Trente ans vu par Francis Scott Fitzgerald (Gatsby le Magnifique)

4 Commentaires

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    • ô Milan sur 4 octobre 2012 à 9 h 49 min
    • Répondre

    COMMENT peut-on associer Florian Zeller à Milan Kundera autrement qu’en acceptant la coquetterie de l’auteur (pour rester à poli) qui consiste à s’en revendiquer par le titre référentiel (un peu comme un clin d’oeil d’acteur au public)? Je n’ose pas dire que c’est une « plaisanterie »… Il suffit de comparer les deux pour constater que tant du point de vue des thématiques que pour ce qui concerne le style proprement dit, ils sont aussi éloignés l’un de l’autre qu’une conserve de lumps d’une boîte de caviar.
    Non, le devenir de la littérature du XXIe siècle, ce n’est pas mettre tous les auteurs au même niveau. Là, en l’occurence, c’est du nivellement par le bas.

      • Nadja sur 25 juin 2014 à 9 h 57 min
      • Répondre

      Je suis bien rassurée de voir que des « lecteurs » ne se laissent pas berner par cette imposture.. La filiation avec Kundera apparaît tellement grossière et si peu subtile que c’en est agaçant, et c’est un euphémisme.
      Le roman contemporain est alors peut être comme le suggère Kundera dans son Art du roman ( dont Zeller semble s’être tant « inspiré » ) à l’image de l’Europe actuelle qui se délite, en pleine perdition..

  1. (Une « influence » de Kundera)

  2. Daddy à 93 ans, me confiait sa première rencontre avec ma grand-mère au bal du Cercle lui paraissant hier, il se souvenait de tous les détails. Il n’avait pas vu sa vie passer. A soixante ans, il lui restait toute une nouvelle vie. Chaplin s’était marié avec Oona à cet âge.

    Florian exprime une fausse idée que l’on a à 30 ans sur la vie, sur la vieillesse. C’est ce qui est touchant dans cet extrait, son erreur de jugement.

    On peut mourir très vieux, on peut mourir très jeune aussi.

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