La honte est-elle l’essence de la littérature ? (Le livre des hontes par Jean-Pierre Martin)

Honte : Sentiment pénible provoqué par une faute commise, par une humiliation, par la crainte du déshonneur… Telle est la définition académique du petit Larousse.
Dans son essai « Le livre des hontes », Jean-Pierre Martin nous en donne une vision autrement plus intéressante en la présentant comme la matière première, « le ferment » le plus puissant de la littérature. « Cet affect majeur et singulier, dit-il serait le moteur absolu des romans ». Il le démontre fort bien en arpentant les plus grands textes de la littérature : de Rousseau en passant par Hawthorne, Dostoïevski, Bernanos ou Genet jusqu’aux contemporains (A. Ernaux, M. Ndiaye, M. del Castillo…). « La honte d’être un homme, y’a t’il une meilleure raison d’écrire ? » disait même Deleuze tandis que Cioran affirmait (dans « De l’inconvénient d’être né ») : « On ne devrait écrire des livres que pour y dire des choses qu’on n’oserait confier à personne. » Par une curieuse coincidence, sort au même moment un autre ouvrage intitulé « Hontes » de Robin Robertson, qui recense les hontes des grands auteurs anglo-américains actuels (de Rick Moody à Chuck Palahniuk en passant par Jonathan Coe…).
Pourquoi « la honte » nous passionne-t-elle autant ? Est-elle vraiment l’essence même de la littérature ? Piquée au vif, j’ai eu envie d’y réfléchir… Le rouge aux joues…

« J’étais atteint de monomanie ordinaire : plus mes érections étaient difficiles, plus j’étais obsédé par les gros seins. D’ailleurs, ça m’inquiétait un peu. Je me disais, Guillaume, fais attention, si tu continues comme ça, quand t’auras 50 ans, il faudra que de vieille putes te fassent caca dans la bouche pour que la chose t’excite. En attendant d’en être là, j’avais des fantasmes de camionneur (…). Le simple fait de penser à ces mots magiques gros lolos, gros nibards, grosses loches, gros poumons, gros roploplos, etc, j’avais une trique pas croyable. L’idéal de mon zob… J’étais confit en dévotion païenne face à la déesse nibards (…) La sincérité de mes élans mystiques était hélas sans cesse contrariée par la pauvreté de mon vocabulaire.
L’émotion ressentie face à une paire de flotteurs se traduisait en langage humain par une incantation vulgaire, médiocre et dérisoire, prononcée intérieurement ou à mi-voix : putain quelle salope ! J’essayais parfois quelques variantes telles que : « alala, qu’est ce qu’elle est bonne cette chienne. » (…) mais en gros il n’y avait pas plus de dix phrases dans mon missel. (…) Tout ça pour dire, que comme le peintre Paul Gauguin, je vouais une passion aux filles un peu grasses, voire un peu bêtes. Mes rêves érotiques étaient peuplés de grosses femmes, elles étaient toujours là à l’heure de mes pollutions nocturnes. Cette honteuse fascination était le pur produit de ma frustration. (…) Ce sentiment douloureux n’avait rien à voir avec l’amour. Au contraire. Mes sentiment amoureux évoluaient de manière inversement proportionnelle au tour de poitrine des filles que je croisais sur mon chemin. (…) Je refoulais ma foi en faisant preuve d’un matérialisme sordide qui s’épanchait sur des poitrines osseuses et de la fesse triste. Ainsi tombais-je toujours follement amoureux de grandes minces au physique androgyne, identifiés par moi à des elfes symboles de pureté.
 »

Ainsi parle le héros (et alter-égo) de Guillaume Clémentine dans son fabuleux roman « Le petit malheureux » , alors qu’il fantasme « dur » sur… une caissière du Leader price… On a fait plus glamour certes mais ce serait beaucoup moins jubilatoire que d’entendre les aveux de cet éremiste parisien qui collectionne les tares honteuses : fumiste, lâche, oisif, ivrogne, « une larve dépressive » à « petit pénis » comme il se décrit…
« Je viens d’achever une nouvelle année sabbatique, paisiblement consacrée au whisky, à quelques trop rares filles, au sommeil et à la masturbation… Mon seul but dans la vie : vivre centenaire pour runier les Assedics. je suis un lâche qui se croit trop malin pour marcher dans la combine et qui refuse de vivre dans l’émotion parce qu’elle lui fait mal. Résultat : je suis le type même du déclassé, une sorte de demi-clochard intellectuel aigri. Je vis des fantasmes de destruction et de dégringolade sociale… »

Ce premier roman, qui hélas ne fut jamais suivi -à ce jour- d’un deuxième, illustre à la perfection la puissance littéraire du « matériau honteux ». Il fait partie des livres que j’ai dévoré avec une jubilation ininterrompue de la première à la dernière page, oscillant entre hilarité, admiration (mais comment ose t’-il avouer des trucs pareils ?!), compassion (« le pauvre quand même »…) et… voyeurisme ? Car c’est peut-être là que réside toute la force de la honte d’un point de vue littéraire : elle satisfait l’instinct voyeuriste du lecteur. Ou plus simplement notre quête de sincérité, d’authenticité face au mensonge permanent de la société ?

Pourquoi la honte est-elle si fascinante ? Parce qu’habituellement ce qui est réputé honteux est soigneusement caché, inavoué, refoulé voire nié. Son exposition au grand jour, dans ses moindres détails et mystères, c’est comme la révélation du Grand secret. Ce Grand secret obscur dont on soupçonnait bien l’existence mais auquel on osait croire parce « qu’on ne dit pas ces choses-là ».
Et pourtant si. C’est bien vrai. Derrière le discours bien-pensant dont on nous abreuve à longueur de temps, la morale, la façade lisse des apparences, la norme rassurante et ronflante, il y a tous nos torts, travers, bassesses, frustrations…
Toutes nos fragilités. Tout ce qui nous rend humain (trop humain). Tout ce qui est finalement passionnant et essence…(tiel). Le dévoilement de la part sombre revêt aussi un aspect transgressif (les sujets honteux sont « tabous » par définition) donc fatalement attractif.

Voici pourquoi la honte fonctionne si bien en fiction. Elle touche, trouble, ébranle les âmes au plus profond, atteint directement l’infiniment intime, invisible et bouleversant : de la petite humiliation qui malmène notre ego jusqu’aux complexes en passant par nos angoisses existentielles…

Jean-Pierre Martin la qualifie « d’alcool fort » de la littérature. Et de citer Cioran qui affirmait dans ses Syllogismes de l’amertume « Les sources d’un écrivain, ce sont ses hontes, celui qui n’en découvre pas en soi ou s’y dérobe, est voué au plagiat ou à la critique. »

Quoi de plus beau qu’un looser magnifique, qu’un personnage qui se plante, qui dérape ou qui dévie ?
Quoi de plus intéressant que les confessions d’un « jeune-homme dérangé » (celles de la jeune fille rangée -Simone de Beauvoir- toutes aussi pétries de hontes, étudiée dans l’ouvrage de Jean-Pierre Martin, sont également captivantes) ?

Oser dévoiler les faiblesses, les siennes ou celles des autres, les raviver, les décortiquer, les observer à la loupe sans détourner les yeux, les gratter voire les mettre à vif avant de les mettre en scène : quel courage (celui de défier ainsi la (sa) vérité en face, sans se dérober) et quelle beauté !
Cette mise à nue à la fois douloureuse, (thérapeutique ?) et incroyable confine tout simplement au sublime.

Nicolas Rey décrivait très bien ce processus d’écriture : « La seule façon pour que ta page soit bonne, c’est de descendre en toi très loin, plus loin. » Même si cela met en danger l’auteur et son entourage. Et d’ajouter : « On n’écrit pas pour faire plaisir à ses parents (ou à ses amis)« . Autre exemple récent : Dans son dernier livre « King Kong théorie », Virginie Despentes transforme aussi avec talent la honte de son physique en clamant « J’écris de chez les moches, pour les moches, les vieilles, les camionneuses, les frigides, les mal baisées, les imbaisables, les hystériques, les tarées, toutes les exclues du grand marché à la bonne meuf… » Une déclaration qui pour elle, vise justement à « cesser d’avoir honte » en disant tout haut toutes « ces choses tues et enterrées« .
Dans un tout autre registre le succès actuel des Bienveillantes de Jonathan Littell rassemble probablement aussi tout ce qu’un homme peut contenir de honteux et de détestable, à l’extrême.

Je ne suis pas loin de penser que c’est la meilleure source d’inspiration pour un auteur. Je prends pour autre exemple l’oeuvre de Chloé Delaume. Ses meilleurs livres (les trois premiers selon moi) sont ceux où elle a exhumé ses hontes ou son dégoût qu’il s’agisse de son expérience de la prostitution, de ses échecs amoureux ou encore de sa famille au lourd passif (dans « Les mouflettes d’Atropos », « Le cri du Sablier et « La vanité des somnambules »). Dés qu’elle s’en est éloignée, ses livres sont devenus beaucoup plus fades et carrément mauvais lorsqu’elle a utilisé ses rancoeurs (« Certainement pas »).
Car la honte n’est pas la rancoeur. Elle n’a rien de commun avec le réglement de compte ni même l’impudeur.
La frontière est ténue et il est facile de passer de l’une aux autres en perdant alors toute la qualité intrinséque de la première au profit de la stérilité des secondes.

Il existe toute une galerie de hontes fécondes en littérature : la honte sociale, familiale, de ses origines raciales (Jean-Pierre Martin cite à ce titre « La tâche », sans doute l’un des meilleurs romans de Philip Roth, où le héros blanc dissimule ses origines afro), la honte de son corps, la honte de vieillir, la honte éthylique (« Mammifères » de Pierre Mérot l’illustre particulièrement bien), la honte de ses travers (avarice, égoisme, être une mauvaise mère/un enfant ingrat…)…
Ma prédilection va à la honte amoureuse : la misère affective et sexuelle (en particulier masculine). Elle a donné les plus belles pages contemporaines à travers l’oeuvre de Michel Houellebecq (ou mon coup de coeur personnel pour « Le petit malheureux » cité plus haut).

Je partage donc le cri d’enthousiasme de Jean-Pierre Martin : Gloire à la honte ! [ Alexandra – Buzz littéraire ]

************************************* HONTES de Robin Robertson
En dépit de leur prestige, les écrivains ne sont pas à l’abri de ces instants d’humiliation publique. Selon Robin Robertson, « le monde des lettres semble même présenter un microclimat on ne peut plus propice à la gêne et à la honte ». Pour le prouver, il a demandé à une soixantaine d’auteurs anglo-saxons, de confesser un souvenir cuisant : en résulte une kyrielle de récits désopilants où l’image du grand écrivain intouchable est quelque peu égratinée… Des conférences devant des salles vides aux signatures-dédicaces catastrophe jusqu’aux interviews fleuve où il est impossible d’aller aux toilettes pendant les séances de torture sur les plateaux TV… La palme reviendrait à Margareth Atwood, programmée dans un tals-show en même temps que l’Association américaine de Colostomie ! Jonathan Coe n’est pas en reste : invité à la télévision française, il a été contraint de partir pour prendre le dernier Eurostar sans passer devant les caméras : « J’ai dû ramper à 4 pattes devant le public du studio en me répétant : « Dix contre un que ça n’arrive jamais Julian Barnes ». On apprend également, à travers le témoignage de Chuck Palahniuk que Stephen King, victime d’une blessure en pleine dédicace s’est vu demander par l’un de ses fans une signature avec son sang !

15 Commentaires

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  1. Bien vu. Je suis d’accord.
    Toutefois, il me semble qu’on peut exhumer ses plus grandes hontes dans des fictions, sans qu’elles soient moins puissantes pour autant, n’est-il pas?
    Je pense que le "je" joue un grand rôle dans tout ça.
    Plus que d’authenticité, je me demande si nous, lecteurs, n’aurions pas davantage besoin de voyeurisme… sinon pourquoi les autobios de stars ou de gens connus, parvenus, leurs drames, leurs hontes, leurs larmes, se vendraient-elles aussi bien?

  2. Argh ! Nathalie, tu mets justement l’accent sur ce qui m’était reproché quand j’ai parlé de ce sujet. Il est vrai que parmi les exemples que j’ai cités beaucoup sont affiliés à l’autofiction. Mais dans l’essai de Jean-Pierre Martin, il étend sa démonstration à tous les genres littéraires (dont La tâche par exemple qui n’est pas écrit à la 1e personne).
    Ensuite sur la question des ouvrages people, il faut préciser en effet que "la honte" est un matériau de base. Après il faut savoir le travailler d’un point de vue littéraire et non pas la restituer d’une façon brute comme le font les people par ex dans leurs ouvrages qui tiennent plus du témoignage qu’autre chose.

    Sur l’instinct voyeuriste du lecteur, je suis d’accord avec toi. Je l’évoque plus haut d’ailleurs avec aussi la quête d’authenticité (pas au sens "d’histoires vraies" mais plus au sens d’humanité.)

    Sinon tu as dû oublier une négation ds ta première question ?
    Pour y répondre, je dirai oui il y a sans doute de très bons livres qui ne s’appuient pas sur cette composante mais j’ai remarqué qu’à titre personnel, les livres qui m’ont le plus marquée ou touchée avaient cette composante directe ou indirectement…
    Et j’ai la sensation que c’est souvent le cas de façon plus générale.

  3. En fait, me concernant ce n’est pas un reproche que je te fais, loin s’en faut, je disais ça surtout parce que je serais incapable d’écrire mes hontes à la première personne.
    Pourtant, je cherche à être la plus sincère possible.
    J’ai oublié d’évoquer la pudeur… cette fameuse pudeur qui fait que certains prennent un pseudo, quand d’autres écrivent des fictions.
    Bonne journée Alexandra. 😉

  4. On écrit essentiellement pour se valoriser, d’une manière ou d’une autre et, en dernière analyse, se taper des femmes (ou des mecs) qu’on ne se taperait pas sans ça. La sublimation de ses hontes peut participer de ça mais ce n’en est qu’un détail.

  5. Moi, le style autobiographique, j’en suis revenu: trop de problèmes avec l’entourage.

    Concernant la honte, je pense que c’est un moteur pour la littérature. Difficile de faire un héros qui avance sans se retourner, parfait à tout point de vue: il doit posséder des défauts et en être conscient, sinon, il aurait l’air soit d’un frimeur, soit d’un simple d’esprit. Dans mon roman "Dirty dirty" ( http://www.lulu.com/content/3103... ; je fais un peu d’autopromo et j’en ai honte, lol), le héros est sans cesse torturé intérieurement. Son employeur est un malfrat, mais il n’ose pas le dénoncer par peur du chômage. Il sait qu’à tout moment, la police risque de débarquer et de l’inculpé comme complice, à cause de son silence. Il est conscient de ce manque de courage et de sa fuite en avant et il en a honte.

    Plus généralement, je pense que la honte est un sentiment clé de la judeo-chrétienté. Mais là, on peut ouvrir un débat politique…

  6. Nathalie tu dis que tu serais incapable d’écrire tes hontes à la première personne et pourtant que tu cherches à être la plus sincère possible.
    Je crois que ce n’est pas une question de dire "Je" ou pas. C’est juste la source émotionnelle, la honte après la façon dont tu l’utilises c’est autre chose. Elle peut s’inclure dans une fiction très éloignée de toi. Mais la base en restera ce truc un peu "sale" ou "douloureux" qui finalement deviendra beau par la littérature.
    Sais pas si je suis très claire ? 🙂

    Max, tu dis : On écrit essentiellement pour se valoriser
    oh la la, attention surtout pas !
    Je trouve qu’il n’y a rien de plus toc quand on sent que l’auteur réalise ses fantasmes (de toute nature) ou se fait mousser en se donnant le beau rôle (à travers son héro) !

    Joest tu dis "Moi, le style autobiographique, j’en suis revenu: trop de problèmes avec l’entourage."
    Je crois que c’est un faux débat le coup de l’autobiographie ou non, tout est de toute façon lié d’une façon ou l’autre au vécu ou aux perceptions propres de l’écrivain.
    Dire "je" ou ne pas dire "je" n’est qu’un détail.
    Et sinon n’hésite pas à faire ta pub : pas de honte à avoir (et c’est bon la honte en plus je te dis !)

  7. Si, Alexandra, tu es très claire… et oui, me concernant, c’est bien cette démarche, plus ou moins consciente, plus ou moins trouble!
    Il y a le besoin d’écrire et puis les freins imposés par le passé, l’éducation, la sensibilité, avec lesquels il s’agit de cohabiter, bon gré mal gré…
    Au plaisir de te lire… 😉

    • Djinna sur 12 octobre 2006 à 20 h 01 min
    • Répondre

    Et moi je me suis toujours demandé comment faisaient les écrivains pour assumer de mettre leur véritable nom sur la jaquette de leur livre.
    Je prendrai absolument un pseudo sous peine de ne plus pouvoir regarder quiconque en face;.

  8. D’accord sur la honte comme matière première. L’une des matières premières, disons… (avec la vengeance et l’amour, par exemple ?)

    Deux types de honte me semblent traverser tous les livres :
    La honte de ce qu’on a fait et qu’on cherche à expier / ridiculiser (par l’humour) / catharsiser…
    La honte aussi de ce qu’on n’a pas fait, petites ou grandes lâchetés que viennent réparer les personnages.

    (Et oui, autofiction ou pas, ce n’est pas la question !)

  9. Prix de flore> je rajouterais la honte de qui on est. C’est valable pour les pauvres, les personnes issues de minorités éthinque, etc. Mais également pour certains Hommes blancs et riches, qui ont honte d’être privilégiés!

  10. > Joest : Exact. La honte de qui on a été, aussi, parfois.

    (> Alexandra – Buzz : merci pour le conseil Marge brute !)

  11. Djinna, oui certains le font quand même. De façon générale je crois que si ça ne fait pas (un peu) mal d’écrire certaines choses, le texte n’est pas bon (on verse dans l’auto-satisfaction).

    Prix, oui mais on réalise que la vengeance ou l’amour sont deux sentiments bien souvent téléguidés par un sentiment de honte. Je pense à Belle du seigneur par ex (plus complexé par son physique qu’Albert Cohen !).

    Oui Joest la honte sociale/professionnelles que j’évoquais sont aussi très fertiles. Parmi mes préférées aussi. Pas encore lu Marge brute, ma cops doit me le passer et je m’en réjouis !

  12. "Téléguidés", je n’irai pas jusque là !! Mais il est certain qu’amour, haine et vengeance entretiennent avec la honte des relations profondes…
    (NB – bien vu ; j’avais commencé une digression sur le sujet puis j’ai eu honte de la faiblese de ce que j’écrivais… alors je n’ai pas écrit 😉

  13. Oui le mot est peut être un peu fort, ils y trouvent souvent leur racine. Qui s’intéresserait à une belle histoire d’amour lisse et parfaite ?
    Deux autres sentiments "moteurs" qui sont étroitement liés à la honte (comme conséquence notamment) : la colère ou la culpabilité comme l’évoque par exemple Amélie Nothomb

    A lire sur la question de la colère, cet article intéressant : "La littérature noire de colère"
    Citation intéressante : « Connu ou pas, talentueux ou besogneux, un auteur est toujours un sac de nerfs » 🙂

    http://www.e-torpedo.net/article...

  14. Je suis tombée sur un article que vient de publier aussi Libé sur le livre des hontes.
    Lien : http://www.liberation.fr/culture...

    ce passage a entre autre retenu mon attention même si je ne pense pas que l’écriture soit salvatrice de quoi que ce soit : On ne choisit guère plus sa honte que sa langue ou son époque ou sa patrie (d’ailleurs, pour Jean-Pierre Martin, cette dernière peut être envisagée comme une honte partagée). Peu importent la latitude, et les us et les coutumes, la honte sera toujours question d’origine et de corps, social et individuel. Or l’écrivain est intéressant pour comprendre ce qu’est un sentiment honteux chez tout un chacun non pas parce qu’il en fait quelque chose (tout le monde le fait, plus ou moins bien) mais plus précisément parce qu’il transforme sa honte à lui en une expérience qui peut être désormais partagée par autrui. L’écriture sauve donc les honteux, parce qu’elle entraîne celui qui s’y livre dans un processus d’ «éhontement» dont Jean-Jacques Rousseau a été l’initiateur moderne. Mais la honte écrite peut être également salvatrice pour le lecteur qui, retrouvant la sienne propre chez l’autre, peut être soulagé par l’appartenance à une commune honteuse humanité, et même se découvrir moins honteux que ce qu’il pensait être.

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