Interview d’Arno Bertina – « Anima Motrix » et « Une année en France » / Salon du livre 2007 (3/6)

Suite de notre tour des stands à la rencontre des jeunes auteurs sur le Salon du livre 2007 :
A côté de Joy Sorman, Arno Bertina patiente. Il attend l’arrivée d’Oliver Rohe et François Begaudeau pour la dédicace collective d’Une année en France (Gallimard). Mais devant le jeune romancier s’alignent également des exemplaires d’Anima Motrix (2006, Verticales). Âgé de 32 ans, l’auteur a déjà à son actif sept publications, dont deux ouvrages collectifs, et collabore à des revues comme Inculte (à noter que François Begaudeau et Oliver Rohe, entre autre, y participent également). Pensionnaire à la Villa Médicis (2004-2005) il déclare « on a travaillé comme des fous, c’était génial ». Car, qu’on se le dise Arno Bertina est un acharné du clavier et orfèvre des mots, de la syntaxe et des fugues narratives.

Buzz littéraire : Les critiques que l’on peut lire sur Anima Motrix s’opposent. Certains journalistes et lecteurs saluent la qualité de votre écriture très creusée et travaillée, expérimentale et d’autres déplorent une certaine confusion dans vos textes. Qu’en pensez-vous ?

Arno Bertina : J’ai bien conscience de cette confusion, car à vrai dire je m’efforce de l’organiser. Et cette confusion n’est pas un plaisir sadique de chahuter le lecteur, mais plutôt de l’ordre de la beauté. A un moment donné, il me semble beau de faire entendre au lecteur autre chose dans mon récit. En revanche, quand on dit de mon écriture qu’elle est cérébrale, là, je ne suis pas d’accord. Le récit et l’écriture fonctionnent ensemble et chacun de mes livres pourraient être un film. L’aspect purement intellectuel n’a pas sa place dans mon travail.

B.L : Comment écrivez-vous ?

A.B : En fait, j’écris d’un jet, à l’ordinateur. Et puis j’imprime, et je corrige. Je rentre les corrections sur l’ordinateur, et je réimprime pour corriger. C’est toujours ainsi et cela prend beaucoup de temps, mais j’en ai besoin. Je cherche, de roman en roman, plus de simplicité mais avec toujours autant de densité. C’est un équilibre complexe à trouver. Et peut-être même que je ne le trouverais jamais. Mais il m’importe de le chercher, de tenter de m’en approcher.

B.L : Dans ces conditions, quand vous construisez votre récit, et que vous le reprenez sans cesse, n’êtes-vous pas parfois dépassé par l’histoire elle-même ?

A.B : Si bien sûr. Il m’arrive d’être totalement emmené par l’écriture. En relisant et en corrigeant, je me laisse surprendre moi-même par le récit. Il prend des directions que je n’avais pas prévu, et qui a ce moment là me semble créer de la beauté. Mais le travail de la phrase est une telle jouissance que je me laisse conduire.

B.L : Et les questions bonus… Que pensez-vous de l’exercice du salon du livre ?

A.B : Mon regard a évolué sur le salon. Il était plutôt négatif. Aujourd’hui je trouve que c’est une bonne opportunité et notamment pour voir d’autres auteurs que l’on croise peu, comme Marie N’Diaye (Mon cœur à l’étroit, Gallimard), assise à mes côtés, que je n’avais pas vu depuis deux ans.

B.L : Quels sont vos coups de cœur littéraire de l’année ?

A.B. : Une méditation, de Juan Benet (Passage du Nord/Ouest), Du bruit, de Joy Sorman (Gallimard), Dans les rapides, de Maylis de Kerangal (Naïve)

Photo et propos recueillis par Anne-Laure Bovéron

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