« De la supériorité des femmes » : Alexandre Lacroix creuse le sillon de la littérature trentenaire

Avec son titre (ironique) qui ne manquera pas d’interpeller, Alexandre Lacroix, un jeune auteur trentenaire (rédac’ chef de « Philosophie magazine » et prof de lettres à Sciences-po) creuse, avec son (déjà) 4e roman, le sillon de la littérature trentenaire et des affres sentimentaux de sa génération. En racontant sa propre rupture amoureuse et les déchirements de la garde alternée de son fils Julien, il livre en filigrane sa vision (plutôt désenchantée et amère) de l’amour, de la fidélité et du couple moderne.

Dans un style direct et explicite sexuellement, mâtiné de références philosophiques ou psychanalytiques (qui restent souvent superficielles voire simplistes), il raconte leur histoire, de la rencontre à Péronne à leurs infidélités respectives, l’amour qui décline en passant par leur vie sexuelle très (trop ?) présente tout au long du récit.

C’est un portrait masculin d’aujourd’hui, celui d’un homme tour à tour désemparé, blessé, furieux, vengeur ou délirant, qui confesse, en toute franchise, ses doutes et frustrations face à une gente féminine qui mène la danse.
Il y a du Nicolas Fargues dans sa prose, même si son style est moins percutant. Pas mal de cynisme et d’amertume également. Fair play, le jeune auteur publie sur son site les critiques positives comme négatives émises par la presse sur son roman.

Voir le site d’Alexandre Lacroix
… et si vous vous demandez toujours ce qu’est la littérature trentenaire

Extraits choisis :

« Après ce matin brisé à Péronne, Mathilde et moi décidons de nous séparer. Mais comme l’idée même de séparation est inadmissible, choquante, nous employons le terme moins tragique de « pause ». Sans présumer de l’avenir, nous estimons préférable de nous éloigner l’un de l’autre momentanément. Il entre, évidemment, une part de duplicité dans ce concept même de pause. C’est un paravent qui nous masque de la difficulté de la situation réelle – on ne se sépare pas d’un cœur léger d’une personne avec laquelle on a vécu 12 ans, il s’agit forcément d’un arrachement, d’une amputation. »

« Il y a un côté commercial dans l’amour. L’acte sexuel ressemble à une négociation. Le but ? Atteindre un record qui ne lève aucune des deux parties. D’ailleurs, cette dimension se révèle progressivement. Les accords tarifaires arrivent assez tard dans l’évolution d’un couple. Si je te suce, tu vas en faire autant. Si tu te prêtes au 69 – que tu n’apprécies pas -, tu pourras en échange me griffer. Si tu jouis la première, tu me laisses finir quand même. Si je te lècge les orteils, tu m’autorises à te fourrer trois doigts dans la chatte. Si tu avales mon sperme, je te ferai ensuite un long câlin immobile et tendre. Chaque couple aguerri possède ses conventions tacites, son jeu subtil de poids et de mesures. »

« Pourquoi nous autres, en ce début du XXIe siècle accordons-nous tant d’importance à la sexualité ? Pourquoi est-ce le domaine dans lequel nous avons décidé de nous réaliser, de découvrir notre moi profond ? Pourquoi la vie sexuelle nous paraît-elle si indispensable à l’épanouissement de notre personnalité ? Les hommes du XIXe siècle ou de l’Ancien régime ne s’en souciaient pas tant. L’effondrement des grands systèmes d’explication du monde nous a laissés face à cet ultime mystère : le sexe. Nous en attendons désormais révélation et accomplissement, comme nos ancêtres demandaient autrefois à Dieu de se porter garant de l’intégrité de leur âme. »

Critique des femmes et des relations amoureuses : « Si jeunes et déjà mégères. Vous ne pensez qu’à cloisonner. Vous installez des parois de verre entre les êtres. Les maris d’un côté, les copines de l’autre. Vous y tenez, à votre indépendance, sans savoir que vous êtes toutes des suiveuses, en plein dans le troupeau… Vous n’avez même pas commencé par penser par vous-mêmes. Tiens, c’est comme ce qu’on entend aujourd’hui sur l’amour fusionnel. C’est le grand truc, maintenant, dans les magazines féminins, chez les psys de bas étage, de dire que l’amour doit pas être trop fusionnel. Il faudrait éviter les relations de dépendance, les grandes passions exclusives. L’idéal ce serait que chacun garde son quant-à-soi, son petit jardin secret. Foutaises… Comme si l’amour pouvait être autre chose que la recherche de la fusion absolue. parler d’amour non fusionnel, c’est comme parler de haine affectueuse. »

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