Un petit tour sur les blogs littéraires nous révèle quelques billets plutôt amers sur la blogosphère, ces derniers temps. Crise d’adolescence ou âge de la maturité ? Toujours est-il que les claviers ne sont pas toujours tendres envers leurs condisciples ! Petit florilège de ces derniers remous… Sans pitié, cinglant et enflammé !
Extraits choisis :
Pour commencer, Bénédicte Desforges lance les hostilités sur son blog « Police » avec son billet intitulé « Le blogueur est malade, il faut l’achever » où elle dénonce l’hypocrisie de l’intimité dévoilée :
« Il se pensait le roi du monde, dressé sur la pointe des pieds en haut de son minuscule podium à ego, ce petit tribun de son moi immense. Face à une tribu qui déserte, absente et ingrate, la salope. Il y avait quelques clampins désœuvrés, chasseurs d’amitiés factices. Mendiants prosternés devant des solitudes miroirs. Et là, d’un coup, il se sent très seul. Les courtisans n’étaient que des passants. Qui déambulaient sur les chemins de l’empathie facile, et de la sympathie approximative, postillonnant des petits mots creux. C’était un terrible effort d’y croire quand il n’en reste presque rien. Des fidèles sans lendemain et sans visages, avec des faux noms et l’esprit flou. La flatterie facile dégoulinant de leurs virtuelles bouches sans voix, la compassion en bandoulière, errant de pages en pages, d’intimités répandues en confidences indécentes. Mateurs chez les autres, et exhibitionnistes dans leur cabane en paille de petit cochon. Échangisme d’inspirations anémiques et d’états d’âmes clones. C’est très con un journal intime, quand la confidence n’est plus un murmure complice, mais un strip-tease en place publique. »
Suite aux réactions d’indignation, l’écrivain-blogueuse a publié dans la foulée un billet où elle cite un extrait de « Bagatelles pour un massacre » de Céline.
Un peu plus ancien mais sur le même thème, vous pourrez aussi lire chez le blogueur Balmeyer son billet intitulé « Insignifiantes fins du monde » qui pourrait aussi être « Vie et mort d’un blog ». Il démontre sa mécanique parfois cruelle pour les âmes isolées :
« Les masques tombent, sans doute. Son écran est vide. Elle s’en serait doutée. Elle a eu tort, sans doute, d’espérer. Quelle comédie. Il n’y a pas de miracle, jamais. Elle a parlé des fleurs et des saisons. Elle aurait donné un bras, pour les autres. Eux, avec leur minable délire sur un monde à refaire, leur pinailleries sur les gouvernements, alors qu’ils sont incapables de voir la solitude noire quand elle passe, avec toutes ces saletés numériques qui leur bouchent les yeux, ces porcs vautrés dans leur fange de synthèse.
Elle parle dans un billet de sa tristesse, de son profond abandon. Elle lance sa petite bouteille à la mer, abominable mer où elle reste irréductiblement immergée pourtant, et aussitôt, à peine publié, elle rafraîchit encore sa boite à lettres. Son écran scintille, c’est un dîner aux chandelles hystériques, elle seule, en tête à tête, face au mutisme effroyable du monde. Elle veut les insulter, leur dire qu’ils ne sont rien, tous, elle voudrait les traiter de sales petits cons, pour qu’ils réagissent au moins, elle les regarde du haut du fond de son trou, elle les maudit comme un prédicateur à la veille de l’Apocalypse ; ils sont tous, et elle est seule, mais ils seront tous engloutis dans leur château de cartes, dans leur torrent d’orgueil« .
Et enfin pour terminer une petite citation d’un « non blogueur » tel qu’il se revendique mais d’un diariste en ligne, l’écrivain et musicien Jérôme Attal qui brocarde lui-aussi au passage les blogs, au détour d’une de ses notes : « La mode est aux blogs où celui qui a la plus grosse gueule se plait à l’ouvrir. Pour schématiser. Les gens postent des textes comme ils postent des photos. Tous les postiers n’ont pas le talent de Bukowski. » (extrait du 15/06/2009)
6 Commentaires
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Tempête dans un verre d’eau…
Bonne nouvelle tout de même, la pensée béate du "travail" et du "succès" (et surtout celui de leur lien indéfectible) a enfin, peut être du plomb dans l’aile:
– Non on ne rencontre pas un large public par hasard (pour cela il y a des règles précises qui sont les mêmes de la télé à la chanson ou au théâtre)
– Non écrire un blog ce n’est pas "faire de la littérature" et les transfert blog/ livre sont toujours navrant (pas de nom ;)) )
Alors oui peut être que les blogeurs sont adultes aujourd’hui, qui sait?
En fait personnellement j’ai comme un doute… Mais il y a aussi longtemps que j’ai fait mon deuil… ;)))
Ceci dit pour l’anecdote j’ai retrouvé par hasard mon journal de 1997 (!) les notes sont déjà identiques à celles de mon blog… Comme quoi, peut être au fond qu’on ne tient pas un blog par hasard…
a+
yann
Ps tu n’es pas touché par ce "mouvement (lame?) de fond" j’espère alexandra?
(je complète le titre du billet avec un "J’irai cracher sur vos blogs" pour rester dans l’actu Boris Vian :-), titre d’un blog aussi d’ailleurs !).
Sinon, oui "tempête dans un verre d’eau", sans doute mais c’est tjs rigolo 🙂
Et puis l’avantage avec les blogs littéraires, c’est que lorsqu’ils se tirent dans les pattes c’est toujours avec un minimum de style !
Sinon, j’aime bien le texte du Balmeyer (en particulier sa métaphore du "dîner aux chandelles"), un blog que je ne connaissais pas, je vous recommande de consulter ses autres textes, des tranches de vie plutôt bien vues.
Non, pas d’accord : pas une tempête dans un verre d’eau. Trop de blogs "tuent"le blog. Comme ttous ces gens qu parlent pour ne rien dire. D’accord avec Attal. L blog veut laisser croire et faire croire que tout le monde sait écrire ou peut écrire. C’est afuax. L’écriture, ça se travaille. Et je n’ai JAMAIS dit que j’étais un écrivain. bon week end
Donc Laurence en somme nous sommes d’accord…
Alors pourquoi "pas d’accord"? Et pourquoi aurais je dit que tu étais un écrivain?
a+
yann
Ma réponse est mal formulée. Oui, j’ai renchéri plus directement sur le post d’Alexandra, le dernier lu. Pour le reste, je ne me suis pas du tout senti visée par tes propos. Je n’ai pas réellement de blog littéraire. Myspace n’est pas lu, j’y abrite seulement les chroniques que j’écris pour ici. Et quelques autres piochés dans la presse. Mes autres textes sont ailleurs, actuellement invisibles. Je voulais juste dire modestement que j’écrivais des romans sans prétendre n’être accessoirment qu’un artisan de la plume. Voilà. C’est tout.
Internet donne l’impression qu’on a tous notre place et droit à une parole, aussi valide qu’une autre. De manière générale, c’est le symbole de la démocratie. La médiocratie…