Virée au salon du premier roman de Draveil et remise du prix du 1e roman

Les prix récompensant les premiers romans sont nombreux comme nous l’évoquions récemment. A Draveil (Essonne), les 18 et 19 novembre derniers, on célébrait aussi ces primo-romanciers à l’occasion de la 5ème édition du Salon du Premier Roman. A l’honneur les romanciers qui accèdent pour la première fois à la publication, tous styles et âges confondus. 55 écrivains étaient réunis au théâtre Cardwell de cette ville de banlieue parisienne. Anne-Laure Bovéron, journaliste littéraire pour le magazine Muze et nouvelle collaboratrice du Buzz littéraire, s’est glissée parmi l’assemblée et nous livre son petit compte-rendu de cet évènement un peu à part :

La réputation française en matière d’écriture n’est plus à faire. Confessée du bout des lèvres, les yeux sur ses chaussures ou scandée haut et fort, la poitrine gonflée de fierté, la pratique de l’écriture se répand comme une traînée de poudre sur les pages blanches. Mais la parution de l’ouvrage tant fantasmé, retouché, soigné, pieusement envoyé aux éditeurs n’est pas à la portée de tous. Et ce quelque soit la renommée de la maison d’édition qui donne corps à cette aventure. Hors publication à compte d’auteurs, s’entend.

Voilà cinq ans que la mairie de Draveil a tourné les projecteurs vers celles et ceux qui ont brillamment franchit, dans l’année, le seuil des maisons d’édition. 35 d’entre elles ont présenté ce week-end leurs jeunes auteurs au prix du premier roman. Les dites « petites » maisons d’édition de province et des pays francophones (un auteur belge concourrait) côtoient ainsi les géants du livre qui ont pignon sur rue dans le Quartier Latin parisien. Un seul impératif, écrire un roman (certains écrivains présents ont déjà publié des essais ou des nouvelles), et en français.

De la science fiction du plus jeune auteur (Jeffrey Drouet, 15 ans) aux romans d’amours passionnels ou aux policiers, la diversité est assurée. Patrick Cauvin (alias Claude Klotz), invité d’honneur, s’est fait porte voix de la décision finale des 39 habitants de Draveil et des environs. Ils ont lu, depuis avril, tous les romans en lice pour finalement s’accorder sur « Carnets de déroute » de Michel Monnereau aux éditions de la Table Ronde (une filiale de Gallimard). Après s’être essayé aux poèmes, aux comédies, l’auteur se jette à l’eau avec le journal intime d’un quinqua au chômage. « A tourner dans mon deux-pièces comme un chômeur en cage, je me suis rencontré trois fois dans le miroir ovale qui me vient de maman, puis l’ai retourné contre le mur. Entre les injonctions des Assedic, l’ennui qui croît, les amours qui s’absentent, les petits boulots qui se raréfient, un homme, la cinquantaine, ancien soixante-huitard, entame la rédaction de son journal intime. Sans emploi depuis plusieurs mois, il y dit le temps qui passe, le regard des autres, l’esseulement, l’errance. Avec un humour grinçant et dans une langue acérée, voici le roman d’une dérive et la chronique d’une génération, celle des baby-boomers, comblée puis laminée. », selon son éditeur. Les deux prix « coups de cœur » reviennent à Paul Desalmand pour « Le pilon » (Dorval Editions) et Claire Tristan avec « Mada » (aux éditions L’aube).

Le salon commence à se faire connaître dans la bulle littéraire. Certes, comme l’accès aux étals des librairies, se rendre à Draveil n’est pas une mince affaire. Ligne de RER, de bus, il faut être armé de plans et de patience avant de pouvoir pénétrer dans le théâtre rougeoyant ! Mais la particularité du prix vaut le détour. Outre la convivialité et une aura de respect inébranlable qui pousse les visiteurs à seulement effleurer les livres du bout des doigts avant de s’adresser timidement aux auteurs tout aussi peu rompus à l’exercice de la promotion de leurs travails, c’est la composition du jury.

Loin des débats sur les prix de la rentrée, les enjeux commerciaux et financiers, la coordinatrice du salon de Draveil, Dominique Renonciat, souligne l’intérêt d’un jury de passionnés. Mieux, la condition sine qua non de ce prix : aucun professionnel n’intervient dans l’élection du lauréat. Lors du deuxième salon les débats entre jurés (alors constitué de personnalités de l’édition et d’amateurs) avaient inquiété les organisateurs. Sur le tapis traînait l’éventualité, ou tout du moins, la question, de récompenser en 2004 une « grande » maison d’édition puisque l’année précédente, une « petite » avait été mise sur le devant de la scène. La polémique autour de l’attribution des prix, le Fémina dernièrement avec l’affaire Madeleine Chapsal, pour ne citer que celui-ci n’atteint pas encore la périphérie parisienne. Le prestige de l’éditeur n’entre ici pas en ligne de compte. Les petits arrangements sont priés de ne pas s’immiscer dans les délibérés. Place nette à la qualité et à l’originalité de l’histoire, du style pour accéder aux prix (3000 euros). Tels sont les critères revendiqués par le jury. Qu’on se le dise ! [Texte et photos : Anne-Laure Bovéron ]

12 Commentaires

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  1. Jolie, l’histoire du jury !
    Cette première chronique aura valu un exemplaire de plus au (euh… non) du Pilon. Je viens d’acheter le livre de P. Desalmand – "coup de coeur" ? nous verrons…

    • Heautontimoroumenos sur 23 novembre 2006 à 10 h 36 min
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    Même si j’ai des réserves de principe, ces petits prix de lecteurs valent davantage et sont autrement sympathiques que leurs prestigieux aînés recuits sauce magouille.

    Entrevu dimanche 19 novembre 2006 sur Planète un documentaire sur le Goncourt 2005… Je ne crois pas être tout à fait niais. Mais les gens de pouvoirs sont décidément plus cyniques que les commentateurs de leurs turpitudes.
    Après un florilège d’énormités dont je n’ai dû voir que la moitié, cerise sur le gâteau, le journaliste demande benoîtement aux jurés, pour couper court aux rumeurs prétendant qu’ils ne lisent même pas le livre lauréat, de raconter la fin du Gaudé –qu’ils viennent juste de couronner. Une débâcle ! La bérézina ! L’un est trop fatigué. L’autre, je crois, n’a plus le temps. Le pompon pour Sabatier qui a particulièrement aimé la ponctuation. Très satisfait de sa pirouette, il se grise : le livre finit bien. Mais il se termine par un enterrement s’étonne le journaliste. Il y a des enterrements qui sont des renaissances réplique sans se démonter le margoulin.
    Je n’avais aucune estime pour le Goncourt. Je n’en étais pourtant pas à soupçonner que c’était une guignolade ABSOLUE.
    Que cette mascarade puisse continuer, de révélations sordides en saligauderies manifestes, cela dit le degré d’impunité de ces gens et la passivité stupide du public. Même les consommateurs de chewing-gum se défendent mieux que les lecteurs.
    63.000.000 de Français et même pas une petite dizaine de jeunes gens pour aller faire du grabuge dans cette bauge à bourges. On ne sait plus s’amuser. Vraiment, ce pays n’est plus ce qu’il était.
    Au pays de Jarry, de dada, des surréalistes, des situs, comment a-t-on pu tomber si bas ?

  2. Heauto, si il y a des gens qui tentent de faire "du grabuge dans cette bauge à bourges" comme tu dis, en lisant vraiment les livres qu’ils sélectionnent, je pense par exemple au prix du 15 minutes plus tard que tu as même salué je crois (comme quoi tout arrive !).
    Et sinon pour Gaudé, je comprends un peu qu’ils ne l’aient pas lu… Enfin ça c’est personnel 🙂

    • PhJ. sur 24 novembre 2006 à 5 h 55 min
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    Oh, c’était pas du grabuge, le 15 minutes plus tard. Edmonde est même venue nous embrasser…
    (A quoi servirait le grabuge avec le Goncourt ? Tout le monde dit depuis des années que c’est complètement bidon, tout le monde le sait, et ça marche encore comme au premier jour, ou presque. Ce serait comme aller faire du grabuge chez Président pour dénoncer à la France entière la qualité très moyenne de leur camembert.)

  3. voui juste un petit coup de pied amical pour dépoussiérer le bidule en somme…

    • Heautontimoroumenos sur 24 novembre 2006 à 20 h 08 min
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    Errata. Gaudé, c’était en 2004.
    Preuve que W. n’était pas inoubliable non plus.

    Pourquoi aller foutre le clandé ? Mais pour le plaisir, pardi !
    Tempête de petits fours.
    Dévastation au champagne.
    Chandernagor retrouvée inanimée dans sa bisque.
    Sabatier suturé après l’envol majestueux toutes pinces dehors du homard thermidor.
    Pivot réfugié dans la cave à vin, qui refuse d’en sortir.
    Tournier hébété sous la table : on susurre que les sphincters ont lâché.

    Dis donc PhJ., tu t’es laissé couvrir de poutous par Édmonde Charles-Roux. Je suis un peu gêné : visiblement tu y as pris goût. Cette dilection gérontophile expliquerait-elle la consécration de ‘Rhésus’ ?

    « Comme quoi tout arrive ! »
    J’adore la perfidie féminine.
    Au plaisir de te surprendre encore.

    • PhJ. sur 27 novembre 2006 à 3 h 30 min
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    Couvrir de poutous ? Pris goût ? Comme vous y allez, Heautomachin. Cela dit, Edmonde est vraiment une femme formidable, drôle et gamine. (Tiens, une petite anecdote. Un jour, je participais à un dîner, genre vers fin septembre, avec trois auteurs qui étaient sur la liste du Goncourt, et la bonne Edmonde. J’étais à côté d’elle, les trois postulants, dans leurs petits souliers, en face de nous (il y avait d’autres personnes, hein). Les trois auteurs étaient fumeurs. Mais bien sûr, pendant le repas, et malgré leur nervosité extrême (au dessert, ils vibraient des pieds à la tête), ils se sont bien gardés de sortir leurs paquets : incommoder Edmonde quand on est dans la liste du Goncourt, c’est comme foutre une baffe à un mafieux serbe quand on en croise cinq la nuit sur une route de campagne. Au café, n’y tenant plus (et n’ayant rien en jeu, malheureusement), j’ai demandé bien poliment à la dame si ça ne la dérangeait pas trop que j’allume une cigarette. Mes trois confrères m’ont regardé comme si j’avais giflé un mafieux serbe. Avec un grand sourire, elle m’a répondu (je ne la connaissais pas, mais elle tutoie facilement tout le monde) : "Au contraire, vas-y, au contraire ! J’adore l’odeur de la fumée, ça me rappelle plein de choses. J’adore l’odeur de la fumée ! Tu peux me la mettre sous le nez." Les trois d’en face étaient vert pâle. Ils ont dû fumer chacun cinq clopes dans la demi-heure qui a suivi.)

    • Louisa sur 30 décembre 2006 à 9 h 48 min
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    Stefani Sen Senar était présente au salon de Draveil avec son roman "Le Firman". Aujourd’hui, il est nominé aux " AUX "GRANDS PRIX NEWROPEANS DE LA DÉMOCRATISATION EUROPÉENNE 2006", catégorie Culture.
    http://www.newropeans-magazine.o...
    Voir le nouveau site de l’auteur :
    perso.orange.fr/stefani-s…

    • inconnu sur 31 décembre 2006 à 10 h 09 min
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    Correctif : Le roman "Le pilon" n’est pas édité chez Dorval Editions.

  4. Yonathan Ebguy voudrait etre present au prochain salon de Draveil pour son premier roman "Crescendo" paru aux Editions Le Manuscrit. Il est bien. Alors.

    • Beaujean sur 18 septembre 2007 à 14 h 16 min
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    Donner un prix à une fiction sur thèm de chomage. C’est bien une idée de bobo qui se la joue. Les vrais chomeurs vivent ça, et ce n’est pas un roman.

    • E-nora sur 26 juillet 2009 à 0 h 53 min
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    Et bien non Beaujean, ce n’est pas une idée de bobo. Les membres du jury lisent activement et surtout réellement tout les livres présentés. Ils ne décernent pas les prix en fonction de mode ou de je ne sais quelle autre idée farfelue. Leur jugement est fondé sur la qualité de l’écriture, de l’histoire etc…
    Avant de juger comment les prix sont décernés, en tout cas pour le Salon du Premier Roman de Draveil, je vous conseil vivement de rencontrer les membres du jury.

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