Orianne Garcia pourrait-elle être notre Mark Zuckerberg hexagonal ? Après « The social network » basée sur le livre « La revanche d’un solitaire », la fondatrice du premier webmail français (Caramail) s’engouffre aussi sur le créneau en racontant sa success story sous le titre très sulitzerien « Comment je suis devenue millionnaire grâce au net, sans rien y comprendre »). Le récit du Web 1.0 français, sur fond de bulle spéculative sans fin, de levées de fonds records et de capital risqueurs prêts à tout ! C’était à la fin des années 90, elle se souvient alors que le monde lui appartenait ou presque… jusqu’à ce qu’il « éclate » :
« Rien ne semblait prédestiner Orianne Garcia, étudiante en lettres, à devenir l’une des reines de la Toile. Pourtant, armée d’un optimisme à toute épreuve et persuadée qu’elle a son rôle à jouer dans cette révolution, la jeune femme va se donner pour objectif de rendre la nouvelle technologie accessible à tous. Dans les années 2000, elle fonde avec succès plusieurs start-up (Lokace, Caramail…), qui lui vaudront le surnom « d’égérie de l’Internet français ». Elle nous raconte avec humour ces années de folie, comment elle a vécu de l’intérieur l’émergence de la nouvelle économie, le scepticisme et les railleries du monde des affaires et des politiques (« Votre Internet, mademoiselle, ça ne marchera jamais ! »), l’euphorie des années 2000, suivie de l’éclatement de la bulle Internet. Aujourd’hui, en Chine, elle explore de nouveaux horizons, aussi bien virtuels que réels. A sa manière, Orianne Garcia a contribué à réconcilier les Français avec la technologie autant qu’avec l’esprit d’entreprise. Nourri d’anecdotes, son livre est un témoignage unique sur cette extraordinaire révolution qui a changé nos vies à jamais. » résume la 4e de couv’.
Orianne Garcia ressuscite ainsi tout un monde perdu, celui des premiers sites francophones, « bricolés » vite et qui vont attirer toutes les convoitises : de Lokace, le premier moteur de recherche francophone, puis en 1997, Caramail, imaginé sur le modèle de l’américain Hotmail avec l’aide de deux amis ingénieurs Alexandre Roos et Christophe Schaming qui lui font découvrir les premiers sites.
72 jours après son lancement, Caramail compte déjà 100 000 abonnés. Mais il faut attendre l’été 1999 pour que l’emballement arrive vraiment avec près de 2,2 milliards de francs récoltés par les start-ups auprès des capital-risqueurs. Orianne Garcia mise alors sur sa féminité pour se démarquer : « A l’époque, je pensais que je n’étais pas crédible. Je n’avais tellement rien pour moi que je n’avais pas grand-chose à perdre. Autant capitaliser et faire de mes faiblesses des forces. Comme j’étais une fille, j’ai compris qu’on allait plus me remarquer. Je m’en suis servi, ça a marché. » Et le comble c’est que ça marche !
Tous les médias se l’arrachent et sa popularité est très forte auprès des fidèles internautes. Mais après quelques mois de folie, la bulle éclate : l’annuaire de sites francophones Nomade et la plate-forme d’hébergement de pages personnelles Multimania sont respectivement racheté par Liberty Surf et introduit en bourse. Quant à Caramail, il sera avalé par le suédois Spray en janvier 2000, valorisé à 600 millions de francs avant d’être racheté par le portail américain Lycos puis Multimania, sans succès.
Les fondateurs abandonnent le navire qui coule considérablement avant d’être une énième fois racheté par l’Allemand GMX en 2009. Si ses deux ex-partenaires ont su faire de nouveaux investissements porteurs (actionnaires de Winamax), Orianne Garcia, actuellement en Chine, n’a pas encore renoué avec le succès après plusieurs projets (dont un site de vente de lentilles de vue). Ce qui ne l’empêche pas de rester optimiste sur l’avenir du web : « J’ai toujours cru en l’internet communautaire, la possibilité pour les gens de prendre la parole, d’exercer un certain pouvoir. J’ai envie de penser que l’internet de demain tirera les gens plutôt vers le haut. C’est peut-être très idéaliste. C’est un internet qui va nous obliger à être intelligent, parce qu’il va falloir exercer notre esprit critique, apprendre aux enfants à ne pas prendre les informations pour argent comptant. Ce sont de gros enjeux mais c’est intéressant parce que ce sont des enjeux humains, sociologiques.«
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