« Les brutes » par Philippe Jaenada et le duo Dupuy & Berberian

Nous vous l’annoncions cet été : Philippe Jaenada, le créateur du mythique Halvard Sanz, trentenaire maladroit et attachant en quête de l’Amour dans son premier roman « Le Chameau sauvage » et les dessinateurs-scénaristes Dupuy & Berbérian, papas d’un autre célèbre trentenaire : le parisien et lunaire « Monsieur Jean », se sont associés à l’occasion d’un roman graphique édité dans la nouvelle collection « Scali Graphic » de l’éditeur éponyme, à paraître le 9 novembre. Le thème ? Les « trois jours », un épisode pittoresque sur le service militaire, raconté avec truculence par celui qui découvre (et surtout refuse) les us et coutumes de « la discipline militaire »…

Philippe Jaenada nous raconte comme personne ne peut le faire, ses Trois Jours (l’une des trois étapes selon lui « pour devenir un mâle autonome, un vrai » après le catéchisme et juste avant… le mariage !). Comment un jeune homme plein de vie, de jupes à soulever, de coudes à lever se retrouve confronté au marche au pas, au pas cadencé, lui qui n’a aucun sens du rythme. Sauf celui d’une vie échevelée de Sioux libre et de guilleret luron. Quelques grammes de fantaisie dans un monde de brutes en somme…

« Les Brutes » s’inspire de l’expérience de Philippe Jaenada, seul face à un régiment de « brutes » (qu’il compare également à des béliers) dans une caserne de France, à Blois Un prétexte pour illustrer la révolte d’un homme face à l’autorité bête et écrasante. Et même si aujourd’hui les 3 jours ne sont plus d’actualité, la force de dire « Non » reste elle extrêmement moderne. « C’est tous les jours, partout, le service militaire. », dit-il au détour d’une page.

A coup d’anecdotes dont il a le secret, il décrit ses petits stratagèmes pour échapper au terrible verdict comme s’enfermer dans sa R5 pendant 48 heures à picoler du whisky en s’interdisant musique, lecture, sommeil, nourriture…, sous les yeux médusés des passants. Bref tout ce dont il peut se priver. Objectif ; s’épuiser et se laminer avant de pénétrer dans « l’antre des brutes », dans un état proche de la débilité absolue (et corser encore l’exercice en recourant à « la parade de la tortue pensant à du saucisson »…). Qui gagnera ce duel de l’intelligence contre la force ? David ou Goliath ? Réponse dans ce récit à la fois humoristique servie par l’imagination farfelue de l’auteur mais aussi, pour la première fois, engagé.

EXTRAITS :
« Que pourraient-ils faire ? M’obliger à réciter ma table de 8, un flingue sur la tempe ? Me forcer à pisser dans un flacon ? Je pisse si je veux. Ils menaceraient de me priver de carrière à la Poste, de tout raconter au ministre de la Défense, ils crieraient, me donneraient sans doute quelques coups sur la tête, mais je ne bougerais pas, je ne sortirais pas de mon mutisme apathique d’extraterrestre. Ils devraient se rendre à l’évidence, avec le drapeau blanc de la résignation (« Celui-là, on pourra rien en faire, chef»), de se dire qu’après tout on en perd qu’un seul, on en a encore des dizaines de milliers, et de s’éloigner de moi en secouant la tête. »

« Il y a des gens qui baisent toute leur vie et qui se font rouler dans la farine du début à la fin. Ils avancent, continuent, ne tournent pas la tête (sauf si un cul passe – cela dit, ça vaut le coup d’oeil) et donc ne s’aperçoivent pas que de grands types au regard dur les domptent et les guident à distance (par télépathie). Toute leur vie, ils travaillent, courent dans les marécages en râlant, ils font des pompes, ils baisent (c’est bien ça), ils cirent leurs godillots, mettent des cailloux dans leur sac et se demandent si ça va s’arrêter un jour. C’est très important, la résistance« . Réservez « Les brutes »

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