« Pop Heart » de Barbara Israël élu meilleur livre de l’année 2007 par Nicolas Rey (pour le magazine VSD)

Nicolas Rey écrivain et critique littéraire notamment à travers ses chroniques pour le magazine VSD vote pour le premier roman de Barbara Israël, Pop Heart, paru aux éditions Scali le 1er août 2007, comme meilleur livre de l’année. Un livre qu’il commente en ces termes : « Ce livre c’est Moins que zéro sans le cynisme de l’argent, c’est la rage de Despentes à ses débuts, le panache d’Ann Scott dans Superstars, et parfois la fantaisie d’un Thomas Lélu. Jules et Jim avec de la guitare électrique comme écriture. ». C’est Stéphane Million qui va être content !

Le premier roman de Barbara Israël, Pop Heart, paru aux éditions Scali le 1er août 2007, a été désigné « meilleur livre de l’année » par Nicolas Rey, du magazine VSD (voir chronique). Avec Pop Heart, Barbara Israël signe un roman initiatique sur la génération des années 1980. Elle raconte l’histoire de trois jeunes adultes à Nice, « deux garçons, une fille, plusieurs possibilités« , ancrés dans la période de l’adolescence, incapables de faire le deuil de leur jeunesse et qui se prennent à croire à l’amour. Composé comme un journal intime à trois voix, ce roman surfe sur la tendance « rock » avec de nombreuses références musicales des années 80/90 (bande-son omniprésente des Smiths aux Mondays, en passant par Ride et les Pet Shop Boys…)… Entre adulescence, soirées décadentes, ecstas, dérive existentielle et confusion des sentiments, l’auteur cherche en filigrane à « disséquer l’âme de la musique pop »… Avis aux amateurs !

Extrait de l’éditeur :
« Une jeunesse dans les années 1980 avait muselé mon cœur, dompté l’espérance. Mes chansons préférées ne parlaient que d’amours trahies, inassouvies, mortes. J’avais vieilli avec elles. Malgré la nausée et la rage qui montaient en moi, j’ai trouvé la force de ne pas exploser. Je me suis relevée et je suis partie sans dire un mot. Ce petit espace puant était censé réunir tout ce que je désirais de la vie. Antoine et Zac. En quelques semaines, ils étaient devenus mon espace, mon temps, ma respiration. Et j’avais cru que la puissance de cette émotion la rendrait irréductible et narguerait le temps qui s’occupait déjà de nous désunir. Forte de mon éternité fissurée, je suis retournée m’asseoir sur les escaliers. Alex avait repris la musique en main. Pop 80’s pédé. Marc Almond, Erasure, Dead or Alive, Depeche Mode. Et je me suis dit que pour une fois je partageais quelque chose avec Alex, mais ce n’était que de la nostalgie. »

Autres extraits :
Antoine. Mon esprit vacillant d’épuisement me renvoie subitement à une autre réalité, celle de ma très petite enfance. Quand mon père et ma mère n’attendaient encore rien de moi. Une très brève période où ils se sentaient satisfaits, émerveillés par ma seule existence, sans fioriture. Mais déjà-là sûrement, nourrissaient-ils quelques rêves pour moi et surtout pour eux-mêmes. Peut-être voyaient-ils dans ce petit enfant d’une beauté incroyable, d’une beauté qui laissait pantois le voisinage et la famille et toute personne qui se retrouvait confrontée à elle, un moyen de me greffer à eux-mêmes, un moyen de les rendre extraordinaires et leur vie aussi.

Avant de sombrer totalement, je me dis que c’est ça qu’ils ont toujours espéré, que je donne un sens, une couleur plus chatoyante à leur existence. Mais la petite existence n’est pas la grande vie et je n’y peux rien.

Zac. Julien a absorbé une boîte de Xanax. Aussitôt après, il a téléphoné aux pompiers pour qu’ils viennent le sauver. La vie fait chier ce type et il nous le rend bien.
Au bout du compte, il organise tout ce cirque pour nous indiquer qu’il veut rester vivant. Et nous, on encaisse juste parce que l’autre veut pas crever. Mais des tas de gens ne veulent pas crever ! Ce type n’a pas le monopole du v–u de non-crevage. Moi et quelques autres crétins nous sommes aussi de la partie !
J’étais en train de savourer un rare et profond sommeil quand ce taré a lancé son énième SOS. Mais le temps que les pompiers débarquent, il était tombé inconscient sur son lit. Ils ont sonné à la porte comme des dératés. Je me suis réveillé en sursaut et suis allé ouvrir, semi comateux, vêtu d’un simple slip, ce qui est plus facile à porter qu’à prononcer. Par chance c’était un Calvin Klein.

Lorsque les pompiers m’ont vu dans cet état, avec ma gueule pas-très-catholique, ils n’ont pas eu le moindre doute. Ils ont tenu à m’embarquer moi et pas un autre.
— Allez, venez avec nous monsieur, on va vous soigner, ont-ils gentiment proposé.
— Il y a certainement une erreur, j’ai répondu. Il doit s’agir de mon frère.
— Laissez-vous faire. Ça va aller… ont-ils insisté, incrédules.
Ils ne pouvaient pas s’imaginer deux secondes que je dormais à l’heure songeuse de l’après-midi, en simple slip Calvin Klein, comme ça, pour le plaisir. J’étais forcément un suicidé en simple slip Calvin Klein. Ils se sont pas même demandés si un type qui porte de simples slips Calvin Klein pouvait réellement avoir envie d’en finir. C’est pourtant le genre de détail qui fait qu’on s’accroche à la vie.

Moïse. … Cette situation me dégoûtait. Je pensais pouvoir l’assumer dans le seul but de combler Zac. Maintenant j’avais juste envie de lui casser la gueule. J’aurais tout donné pour qu’il disparaisse d’un simple claquement de doigt. J’avais trop regardé la télé. Dans la vie, ça ne se passe jamais comme ça. La vie préfère les souvenirs amers et la moiteur du pourrissement. J’ai repensé à ce morceau de Lush, Untogether, à cet incroyable moment dans la voiture. J’ai repassé tout le morceau dans ma tête. Il résonnait déjà comme une vieille mélodie, vestige d’une heureuse fulgurance qui ne se répéterait plus jamais. J’en étais convaincue. Une jeunesse dans les années 80 avait muselé mon c–ur, dompté l’espérance. Mes chansons préférées ne parlaient que d’amours trahies, inassouvies, mortes. J’avais vieilli avec elles. Malgré la nausée et la rage qui montaient en moi, j’ai trouvé la force de ne pas exploser. Je me suis relevée et je suis partie sans dire un mot. Ce petit espace puant était censé réunir tout ce que je désirais de la vie. Antoine et Zac. En quelques semaines, ils étaient devenus mon espace, mon temps, ma respiration. Et j’avais cru que la puissance de cette émotion la rendrait irréductible et narguerait le temps qui s’occupait déjà de nous désunir.

Forte de mon éternité fissurée, je suis retournée m’asseoir sur les escaliers. Alex avait repris la musique en main. Pop 80’s pédé. Marc Almond, Erasure, Dead or Alive, Depeche Mode. Et je me suis dit que pour une fois je partageais quelque chose avec Alex, mais ce n’était que de la nostalgie.

Le site des Editions Scali

5 Commentaires

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  1. Scali, la petite boite qui monte…

    • la ptite lili sur 21 décembre 2007 à 14 h 27 min
    • Répondre

    On peut lire quelque part sur le Net la chronique de Nicolas sur ce roman ?

    • wesh wesh sur 21 décembre 2007 à 16 h 41 min
    • Répondre

    Trop peu pour moi… j’ai deux chefs d’oeuvre qui m’attendent sur ma table de chevet: "Lumière d’août" de William Faulkner et "Orages mécaniques" d’Ernst Jünger… c’est effroyable de croire que ce genre d’auteurs prétendent être écrivains quand même… l’extrait a suffi à me faire comprendre le contraire… Plus incroyable encore est peut-être l’éditeur… évitons de faire passer des vessies pour des lanternes; circulez, y a rien à voir!

    • - je ne suis pas Stéphane Million - sur 27 décembre 2007 à 12 h 12 min
    • Répondre

    Je n’aime pas spécialement Nicolas Rey mais ce livre est vraiment super, et je n’ai pas eu besoin de lui pour m’en rendre compte !

    • Israel sur 1 août 2008 à 9 h 56 min
    • Répondre

    Un lien pour l’acheter ?

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