Humeurs et autres curiosités littéraires

Des questions et des bouts de réponses sur le petit monde merveilleux des livres, de l'écriture et de l'édition...

Politique et littérature font-elles vraiment bon ménage ? De Zola à Régis Jauffret…

Je souhaite réagir à un phénomène qui me gêne : celui de rapprocher littérature et politique. C’est l’initiative du Matricule des anges consistant à « donner aux écrivains la possibilité de s’exprimer sur la campagne électorale » sur un blog spécial « Ecrivains en campagne » qui en est le catalyseur…

« Boys in the band » de David Brun-Lambert : La bio fictive fait-elle le roman ?

Récemment les propos de Tzvetan Todorov, auteur de « La littérature en péril » dans Télérama a relancé la polémique sur le soi-disant danger de la littérature nombriliste ou narcissiste (un beau bourrage de crâne !). Si la vie d’un auteur peut souvent être la matière première de son inspiration (et il n’y a rien de répréhensible à cela), il arrive un moment où ce matériau s’épuise bien naturellement. C’est ainsi que nous assistons au boom du « roman biographique » (qui trouve son pendant cinématographique dans le « biopic ») basé sur des faits réels. A ce sujet David Lodge (encore un célèbre « nombriliste » mais c’est fou ça !) commentait dans le magazine Transfuge : « Nous vivons dans une société où l’on croule sous les faits souvent extraordinaires. Cela donne l’impression de vivre dans un monde spectaculaire. Vous pouvez recevoir des informations 24h/24 ! Cette surinformation confère une grande puissance au roman fondé sur des faits authentiques, plus séduisants pour le public que la pure fiction. »
Et d’ajouter « Trouver le matériau de son oeuvre est un problème capital. Or, avec le temps, pour la plupart des gens, les expériences de vie se raréfient : ils tombent amoureux, se marient, font des enfants, etc. Un écrivain confronté à ses limites va se tourner vers les histoires et expériences des autres. » C’est sur cette introduction un peu longue que l’on arrive au roman « Boys in the band » de David Brun-Lambert (ex journaliste de Radio Nova). Une bio « fictive » du cultissime Pete Doherty, rockstar internationale d’origine anglaise du moment, déguisée en roman (dont le titre est celui d’un des morceaux du groupe). Crédible ?

Ecrivains-réalisateurs : Les écrivains sont-ils les mieux placés pour adapter leur roman (de Houellebecq à Yann Moix…) ?

Dans son excellente émission L’Hebdo cinéma, Daphné Roulier s’interrogeait samedi dernier sur la pertinence des écrivains-réalisateurs avec pour témoin privilégié et invité : Michel Houellebecq en personne accompagné de son agent François Samuelson. L’auteur de « La possibilité d’une île » s’apprête en effet à tourner en avril (après sa crise de l’été dernier) l’adaptation de son roman, un conte philosophique qui traite de clonage, de secte et d’immortalité et se déroule entre aujourd’hui et l’an 4000, avec dans le rôle phare de Daniel, un humoriste à succès vieillissant, le comédien Benoît Magimel (qui est représenté par la même agence « Intertalents » que l’écrivain.). Un film produit par Mandarin Films.

« Les impasses mortelles du roman français » : Au secours, les bien-pensants de la littérature sont de retour !

Même si l’on tente d’éviter les débats périphériques à la littérature (souvent stériles) sur BUZZ… littéraire, voici tout de même une courte réaction à une nouvelle enquête très intéressante même si sans doute un peu vaine de Télérama. Enquête qui vient une fois de plus apporter de l’eau au moulin à la soi-disante « pauvreté » de la littérature contemporaine française, en dépit de quelques molles réserves…

Rentrée poético-folk avec Carla Bruni (No promises)… Quand la guitare de Carla rencontre les vers romantiques du XIXe siècle


Dear Carla,
Je viens de recevoir votre album… et je suis très ennuyée. A cause de vous, je vais devoir tout changer. Oui Carla, à la vue de votre sublime pochette de CD, j’ai compris que c’était là que je voulais habiter. Dans cette chambre hors du temps, ce petit boudoir anglais feutré avec le même coussin en velours vieil or pour lire, posé comme un nuage sur un authentique parquet blond qu’on imagine craquant sous les pieds, les mêmes roses un peu fânées et nappes chamarrées, le transistor sixties, les paniers en osier, la méridienne vintage, la même lumière couleur thé et… et surtout la même chemise de nuit brodée d’héroïne victorienne (avec votre silhouette à la David Hamilton tant qu’à faire !).
Je veux absolument tout ce savant désordre bohême-artistico-chic, ce romantisme surrané du XIXe anglais peuplé de petits trésors kitsh qui invitent aux rêveries, aux veillées douces où l’on se gorge de mandarines et de chocolats sous les patchworks et les plaids irlandais… Un décor, une atmosphère enchantés, parfaits pour écouter votre nouvel album ciselé où vous susurrez les poèmes des plus grands de l’Angleterre et de l’Amérique d’hier, comme autant de secrets précieux et duveteux…

« J’ai pas lu mais j’ai adoré » ou De l’art de bien parler des livres que l’on a pas lus…

Tout lecteur qui se respecte aura une fois été confronté à cette terrible angoisse (ou honte avec rougissement phosphorescent à l’appui) du « J’ai pas (encore) lu » alors que votre interlocuteur vous demande hyper enthousiaste ou au contraire catastrophé votre avis sur le dernier « livre dont tout le monde parle en ce moment » ou vous livre son analyse hyper pointue sur ce chef d’oeuvre incontournable que vous DEVEZ avoir lu. Un peu d’improvisation (et de broderie) s’impose donc parfois… Le dernier exemple en date serait probablement « Les bienveillantes ». Même ceux qui ne l’ont pas lu en parle très bien : se pâmant ou fustigeant à l’envie (Quoi ? Pourquoi vous me regardez comme ça ?!).

Le journalisme est mort, vive le journalisme !

Arrivée à la fin l’émission Arrêt sur image sur France 5 hier midi, je n’ai pu intercepter que la fin du débat intitulé « Primaire PS : nouvelle donne médiatique ? ». Débat qui ne m’intéressait pas spécialement mais les propos de Paul Nahon, directeur de l’information de France 3 en réponse à la question de Schneidermann sur les mutations du travail de journaliste face à la multiplication des documents amateurs diffusés sur Internet (en particulier les vidéos postées sur Dailymotion ou Youtube et reprises en podcast sur les blogs…) m’ont particulièrement surprise et interpellée. Ils font écho, dans une moindre mesure, aux thèses développées dans « Bandes alternées par Philippe Vasset« , présenté précédemment…

Les (petites) hontes des écrivains « de chez nous »

A l’occasion d’un récent billet, étaient présentés les ouvrages « Le livre des hontes » de Jean-Pierre Martin et « Hontes » de Robin Robertson, Cuné qui vient de faire un billet sur le second ouvrage confie qu’elle rêverait de trouver la même anthologie des écrivains de l’hexagone. En écho à son interrogation, voici deux revues de presse sur la question : le Figaro s’est prêté à l’exercice en interrogeant Eliette Abécassis, Stephen Carrière, Serge Joncour, Charles Dantzig, Valentine Goby, Philippe Labro, Robert Sabatier, Marc Lambron et Jean-Marie Rouart… Le magazine Elle en a fait de même il y a quelques semaines avec notamment Yann Moix, Marie Desplechin ou encore Alice Ferney et Laurence Tardieu…

La honte est-elle l’essence de la littérature ? (Le livre des hontes par Jean-Pierre Martin)

Honte : Sentiment pénible provoqué par une faute commise, par une humiliation, par la crainte du déshonneur… Telle est la définition académique du petit Larousse.
Dans son essai « Le livre des hontes », Jean-Pierre Martin nous en donne une vision autrement plus intéressante en la présentant comme la matière première, « le ferment » le plus puissant de la littérature. « Cet affect majeur et singulier, dit-il serait le moteur absolu des romans ». Il le démontre fort bien en arpentant les plus grands textes de la littérature : de Rousseau en passant par Hawthorne, Dostoïevski, Bernanos ou Genet jusqu’aux contemporains (A. Ernaux, M. Ndiaye, M. del Castillo…). « La honte d’être un homme, y’a t’il une meilleure raison d’écrire ? » disait même Deleuze tandis que Cioran affirmait (dans « De l’inconvénient d’être né ») : « On ne devrait écrire des livres que pour y dire des choses qu’on n’oserait confier à personne. » Par une curieuse coincidence, sort au même moment un autre ouvrage intitulé « Hontes » de Robin Robertson, qui recense les hontes des grands auteurs anglo-américains actuels (de Rick Moody à Chuck Palahniuk en passant par Jonathan Coe…).
Pourquoi « la honte » nous passionne-t-elle autant ? Est-elle vraiment l’essence même de la littérature ? Piquée au vif, j’ai eu envie d’y réfléchir… Le rouge aux joues…

Faut-il brûler la littérature « nouvelle génération » (bon et pis c’est quoi ce concept bidon d’abord ?) ?

Comment mettre un peu d’animation à un dîner entre fins lettrés sans pour autant semer la zizanie ? Facile… Lancer le sujet éternel mais ô combien fédérateur du « La littérature contemporaine c’est de la merde et du c’était mieux avant… » Vous verrez immédiatement les têtes acquiescer, s’enthousiasmer, se gargariser, abonder dans votre sens et se lancer dans des tirades enflammées « C’est une honte… », « Tous ces pseudo-auteurs de merde… », « Il n’y a plus de vrai écrivain en France… (à part peut-être moi ?) ». Patati et patata. C’est bien connu : « Un bon écrivain est un écrivain mort ». Tout le monde s’auto-congratulera de cette saine prise de conscience. Et c’est là que Buzz littéraire entre en scène…

Humeur : Les écrivains doivent-ils (vraiment) écrire leur blog ? Quand les plumes s’assèchent ou dérapent…

Nous suivons depuis quelques mois déjà l’actualité des blogs d’écrivains, primo-romanciers et auteurs wanna-be. Il est intéressant de visiter de temps à autre les-uns et les-autres afin de constater l’évolution qu’a pu prendre l’un ou l’autre blog. En particulier ceux tenus par les écrivains (publiés). Récemment (au 15 août), le jeune écrivain belge Thomas Gunzig a fermé le sien après 4 mois d’existence. D’autres comme Guillaume Chérel affiche au contraire une belle santé. Pourtant, on peut se demander si ces espaces de libre expression ne desservent pas l’écrivain s’il ne s’impose pas quelques principes…

Humeur « Rentrée littéraire » : Peut-on résister au diktat de la nouveauté ?

« Le grand public pense que les livres, comme les oeufs, gagnent à être consommés frais. C’est pour cette raison qu’il choisit toujours la nouveauté. » (Goethe)
A l’approche de l’évènement littéraire de l’année : la rentrée littéraire de septembre, le lecteur avisé contemple perplexe, sa « pile à lire  » (que les initiés désignent de l’acronyme P.A.L) et décide au choix d’ignorer royalement les sirènes des éditeurs et des médias ou bien se résigne à repousser encore un peu l’entame de cette sélection qui a le défaut d’être « moins jeune ». Tandis que d’autres, joyeux de cette grand messe rituelle, piaffent d’impatience depuis juin et se languissent de pouvoir enfin se saisir de ces précieux ouvrages labellisés « rentrée littéraire » ! Une moisson nouvelle, rutilante (du moins présentée comme telle), miroitante, dont on vante les mérites et qui devrait faire interrompre tout autre projet de lecture pour ingurgiter cette goulée de « nouveaux nés » ?

Les auteurs et la tentation des adolescentes : le fantasme de « l’extrême jeunesse »

« Ce qu’il y a d’implacable dans les amours adolescentes, c’est qu’elles vous dégoûtent à jamais des autres. Lorsque vous avez tenu dans vos bras, baisé, caressé, possédé un garçon de 13 ans ou une fille de 15 ans, tout le reste vous paraît fade, lourd, insipide. Socrate éprouvait comme une secousse électrique au simple contact de l’épaule nue d’un joli gamin. Moi, les yeux fermés, je peux du seul bout des doigts dire si un sein, un ventre, un dos ou un mollet appartiennent oui ou non, à un être d’extrême jeunesse. Cette merveilleuse peau des moins de 16 ans, tiède, veloutée, lisse, parfumée, savoureuse, auprès de laquelle tout autre grain semble ou gras ou rugueux ou desséché. » Gabriel Matzneff, extrait de « Les moins de seize ans »

Hors série Le Point : « les textes fondamentaux de l’érotisme » et « Le désir » vu par le magazine littéraire

Pour son numéro estival, le magazine Le Point a eu la bonne idée de proposer un voyage littéraire érotique, dans le temps, à ses lecteurs. De Platon, Lucrèce, Ovide jusqu’à Sade, Georges Bataille, Henry Miller en passant par Apollinaire, Verlaine ou encore Alfred de Musset…

L’esprit Matzneff et les jeunes auteurs (Beigbeder, Nicolas Rey, L.Lanher etc.)

matzneff et beigbeder litterature

Dans les années 80, Gabriel Matzneff s’est fait le chantre des « amours mineures ». L’écrivain sulfureux était alors l’invité de tous les plateaux TV et prestigieuses émissions littéraires pour faire leur apologie et leur éloge. Démon pédophile (ou « philopède » comme il le fait dire à l’un de ses personnages), honteusement en liberté, immoral et pervers pour certains. Insolent magnifique, grand écrivain érudit, expert de littérature latine et fin analyste géopolitique pour d’autres. Aujourd’hui encore, son aura subversive touche (influence ?) de nombreux jeunes auteurs qui le citent régulièrement comme référence.

Humeur : Faut-il devenir boulimique de livres ? ou l’Eloge de la lenteur

Parfois, j’ai le vertige voire la nausée en pensant à tous les livres qu’il me reste à lire… Je fais des listes. J’essaie d’organiser, de retenir les titres, les auteurs. Les « indispensables », les « pour le plaisir », les « chefs d’oeuvre », les « premiers romans », les « à découvrir même si c’est pas mon style », les « insolites », les « coups de coeur », les « primés »… J’achète, j’emprunte, je stocke, j’empile, je feuillette, j’ingurgite… Et parfois j’ai des hauts le coeur… en pensant à tout ce que je n’ai pas encore lu. Mais comment font ceux qui lisent un livre par jour ?

Ecriture féminine/masculine : la littérature a-t-elle un sexe ?

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Le sujet de la littérature féminine semble être dans l’air du temps puisque à son tour le magazine Lire rend hommage aux femmes et publie un spécial « écrivains filles » (voir notre dossier en cours) pour son numéro de mai 2006. L’occasion pour le chroniqueur Frédéric Beigbeder de réagir à cette classification « sexuée » qui peut porter à controverse.

Intellos-précaires : victimes consentantes ?

« Les intellos précaires » est un essai publié en 2001 par Anne et Marine Rambach, deux éditrices et écrivains indépendantes. Un livre qui ne manque pas de rappeler certains débats d’actualité sur la montée et le refus de la précarité, et autres batailles d’intermittents du spectacle, même s’il s’applique au monde de l’édition, du journalisme et artistique. Une thèse juste pour une noble cause mais parfois un peu utopiste et caricaturale :

Pour vivre heureux, vivons fauchés !

Oui vous avez bien lu ! N’est-ce pas une déclaration propre à faire rêver ? C’est plus précisément le titre d’un article publié dans le magazine Glamour du mois de mars 2006. L’enquête réalisée par la journaliste Audrey Diwan (ex Technikart et également éditeur free lance pour Denoël) pointe un nouveau phénomène en plein essor outre-rhin. Plus précisément à Berlin. Nom de code : « le Mouvement de la décroissance festive »…

Le titre fait-il le best-seller ?

La littérature se réduit difficilement à une équation mathématique. Et pourtant un groupe de statisticiens américains (qui d’autres pourraient s’atteler à une telle tâche ?!) a travaillé pendant plusieurs mois pour déterminer la recette du succès littéraire.
L’équipe de trois statisticiens dirigée par Alvai Winkler, assistés de programmeurs, a étudié 54 années de hit-parades littéraires du New York Times et les 100 meilleurs romans du classement de l’émission Big Read de la BBC.